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parlementaire n’existe plus. Il est remplacé en fait parle régime du pouvoir absolu.

En Grèce, pays constitutionnel, l’exercice du droit de dissolution est soumis a des règles, à des traditions très précises. Le roi Othon avait été exilé parce qu’il avait cru pouvoir se servir de ce droit comme bon lui semblait, dans le dessein de régler la politique de l’État d’après sa propre volonté. Le roi Georges, son successeur, se trouva au début de son règne aux prises avec de très grosses difficultés. Pour en sortir, il essaya de dissoudre la Chambre, ce qui souleva l’opinion publique. M. Charilaos Tricoupis se fit l’interprète de ce mécontentement dans un article intitulé : « A qui la faute ? » Le Roi le fit poursuivre devant les tribunaux ; mais quelque temps après, c’est à lui qu’il confiait la mission de former le nouveau ministère. Le discours royal prononcé lors de l’ouverture du nouveau Parlement marquait très nettement la limite des prérogatives de la Couronne en ce qui concerne le droit de dissolution. Il est comme une charte entre la couronne et le peuple. Le Roi ne peut dissoudre la Chambre que lorsque celle-ci, de toute évidence, ne représente plus la volonté du pays, lorsque, élue longtemps auparavant et les circonstances ayant entièrement changé, elle se trouve en présence d’une situation toute nouvelle.

Depuis cette époque, durant son très long règne, le roi Georges ne recourut qu’une fois au droit de dissolution, au commencement de 1892. La Chambre avait été nommée il y avait deux ans. Une grave crise financière s’étant produite, l’opinion publique s’était prononcée avec beaucoup de force contre le cabinet Delyannis qui, quoiqu’il disposât de la majorité à la Chambre, ne représentait plus la majorité du pays. La preuve en fut d’ailleurs faite aux élections suivantes, où la plupart de ses partisans furent battus. La dissolution de la Chambre était donc conforme au désir de l’opinion publique.

La situation était bien différente, on peut même dire opposée, en 1915, au moment où Constantin accomplit son coup d’État. La Chambre renvoyée par lui, au mépris de tous les droits, de toutes les règles, n’avait que trois mois d’existence. M. Gounaris, alors président du Conseil, docile exécuteur des volontés royales, avait essayé par tous les moyens de peser sur les électeurs, pour les amènera voter contre M. Venizelos. Le Roi