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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




Tout se tient, se complète ou se compense dans cette guerre « colossale : » victorieux sur les bords de l’Yser, le maréchal sir Douglas Haig félicite à bon droit le général Allenby des succès remportés à Bir-es-Seba et à Gaza. A plus forte raison encore pour des armées qui opèrent en liaison : leurs chances font bloc en une même fortune. Ainsi de l’action menée par l’armée britannique, avec l’armée Anthoine, dans les Flandres, et de notre dernière bataille de l’Aisne, dont le tableau porte définitivement plus de 11 000 prisonniers faits et près de 200 canons enlevés. Mais ce butin ne mesure pas, n’exprime pas à lui seul toute l’importance de la défaite allemande. L’état-major impérial et son quartier-maître Ludendorff ont beau envelopper l’aveu des commentaires et explications d’usage : recul stratégique, repli élastique, retraite volontaire, manœuvre savante; le fait crie, malgré eux, plus haut qu’eux, et le fait est que les Allemands nous ont abandonné leurs positions de la vallée de l’Ailette. Nous sommes désormais les maîtres de ce Chemin des Dames, si âprement disputé durant de si longs mois, depuis Laffaux jusqu’à Corbény, par-delà la forêt de Vauclerc ; et, de cette crête, nos vues s’étendent au loin. Ce que l’ennemi vient de nous céder là, ce n’est pas seulement un lambeau précieux de notre territoire, enfin libéré; c’est un signe et un gage de notre supériorité militaire qui chaque jour s’affirme et grandit. Réjouissons-nous-en sans réticence, et de tout cœur félicitons-en les chefs éminens et les vaillantes troupes de qui ce beau résultat couronne aujourd’hui le patient effort. Que les numéros de leurs divisions et de leurs régimens, à défaut de leurs noms inconnus, soient inscrits, au-dessous du nom du général Maistre, dans le Livre d’or de la patrie ! Le gouvernement s’est empressé de leur rendre hommage : c’est justice, mais remontons un peu, car ce n’est que la moitié de la justice.