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précédente, elle suffit à compenser, et au-delà, la diminution de pouvoir nutritif par unité ; finalement donc, la quantité de calories fournies à l’homme par tout le pain qu’on peut tirer de 100 kilos de blé est plus grande, si ce blé est à blutage élevé. — D’après cela, il y aurait a priori intérêt à utiliser le blé à 100 pour 100 de blutage, c’est-à-dire sans rejeter rien des issues de meunerie, du son.

Or, on ne le fait pas, et personne ne propose de le faire. Pourquoi ? C’est que les blutages très élevés présentent d’autre part certains inconvénient dont nous allons parler, et sur lesquels les partisans des blutages ne dépassant pas 80 pour 100 ne manquent pas d’insister :

1° La conclusion qu’on peut tirer des expériences de Snyder relatives au meilleur rendement alimentaire des blés, lorsqu’on les blute à un taux élevé, ne serait rigoureusement juste que si on utilisait aussi bien (pour prendre les chiffres sur lesquels on discute) le pain à 85 pour 100 que le pain à 80 pour 100. Or, il semble bien que tel n’est pas le cas : en particulier, il semble qu’on gaspille et surtout qu’on ait gaspillé cet été beaucoup plus le premier. Dans certains quartiers de Paris, les ordures ménagères contenaient, il y a peu de temps, en moyenne jusqu’à 6 pour 100 du nouveau pain ; un autre indice de ce gaspillage a été cherché dans le fait que le commerce des croûtons de pain destiné aux animaux est devenu beaucoup plus florissant, en particulier dans les environs de Paris où le son manquait ;

2° Les adversaires des blutages élevés se sont demandé si le petit bénéfice énergétique fourni par ces blutages n’est pas contre-balancé par le travail plus considérable que l’intestin doit fournir pour éliminer les résidus considérablement accrus de la digestion et qui, lorsqu’on passe du pain à 80 pour 100 au pain à 85 pour 100, ont un volume quadruplé. M. le professeur Gabriel Bertrand, en particulier, a fait sur ce sujet une intéressante communication à l’Académie des Sciences. Malheureusement, il faut convenir que les données expérimentales manquent qui permettraient de faire sur ce point un bilan numérique et de prononcer à cet égard ; la question n’en est pas moins posée avec toutes ses conséquences ;

3° Enfin, on a objecté que les millions de quintaux de son que l’on récupérerait en revenant à un blutage plus faible sont utiles à l’alimentation du bétail et seront plus nécessaires s’ils sont mangés par lui que par nous, parce que les ruminans digèrent et assimilent le son et les cellules à aleurone incomparablement plus et mieux que l’homme.

Les partisans du maintien à 85 pour 100 du blutage moyen du