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LE RAVITAILLEMENT
DU
NORD DE LA FRANCE ET DE LA BELGIQUE


I. — CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES

Parmi les conséquences douloureuses de la guerre et de l’invasion, il en est peu d’aussi cruelles que la situation des populations de la Belgique et de nos départemens envahis. Nulle part le caractère nouveau d’une lutte sans merci, dirigée, non pas seulement contre les armées ennemies, mais contre les habitans inoffensifs, les maisons, les monumens, les arbres eux-mêmes, n’a revêtu un degré d’inhumanité comparable à ce que les Allemands ont pratiqué dans les régions qu’ils ont envahies en 1914. Dès qu’il apparut que les flottes alliées rendraient de plus en plus difficiles les importations en Allemagne, les envahisseurs donnèrent clairement à entendre qu’ils laisseraient, sans remords, souffrir d’une nourriture insuffisante les dix millions d’hommes qui demeuraient sous leur joug plutôt que d’entamer leurs propres réserves.

Ce fut en Belgique que, dès le mois de septembre 1914, les premières craintes se firent jour au sujet de l’alimentation. Plusieurs notables se réunirent, se mirent en communication avec des Américains habitant Bruxelles, en premier lieu avec leur ministre, M. Brand Whitlock. Celui-ci écrivit à l’ambassadeur des Etats-Unis à Londres, M. Page. C’est sous les auspices de ces diplomates, assistés de collègues espagnols et hollandais,