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« Je ne pense point encore à t’envoyer des modes, parce que, d’abord, Mme Murat n’a pas été de cet avis, n’y ayant absolument rien de nouveau. Dans le monde, ce sont toujours des tailles très courtes. En négligé, tout robes courtes en percale brodée et garnie en belle dentelle. Ensuite on met, si l’on veut, une juive aussi brodée tout le tour et garnie de même, mais sans taille. C’est une ceinture en percale qui attache devant et, pour cacher cette ceinture, on a une bande de percale, coupée en dents de loup et brodée à jour qui retombe dessus. Les dents sont courtes. Voilà les déshabillés élégans de la princesse. Le soir, elle a de petites robes, rondes toujours, de taffetas de différentes couleurs, les unes garnies en crêpe, les autres de même étoffe posée à cheval et froncée comme avec des rubans. Ce que tu peux te donner qui est très joli et que je lui ai vu, c’est une robe de crêpe rose à queue brodée en coton blanc. C’est très élégant. Quand la Cour sera de retour, c’est alors que je te parlerai modes et que je pourrai faire tes emplettes, mais, en ce moment, Paris est tout à fait désert, il n’y a d’élégance dans aucun genre. »

Elle est encore à Maisons le 30 fructidor (1T septembre) : « Coppe a fait partir douze paires de souliers pour toi ; j’espère qu’il se sera bien rappelé ta mesure. Du moins il me l’a assuré. Il te les fait au même prix que Menier et il t’en enverra huit paires tous les mois comme nous en sommes convenues. On trouve assez généralement que Mme Murat est mal chaussée et il n’y a qu’elle qui se trouve bien. Ses souliers ont le même défaut que les tiens. Ils sont trop couverts et trop pointus. Et puis, elle n’a pas la jambe et le pied aussi jolis et aussi parfaitement faits que les bras et la main. J’aurai de ses nouvelles aujourd’hui par Saint-Cyr qui est allé à Paris hier après déjeuner pour se rendre le soir à l’assemblée de Neuilly. Tous les lundis, les assemblées sont la répétition des cercles de Saint-Cloud, excepté qu’ils sont moins nombreux. Le premier a été mortellement ennuyeux, mais ceux auxquels je me suis trouvée depuis ont été supportables parce qu’on y a joué. J’y ai vu Mme Grua qui est à Paris avec Lechi.[1]Elle a dû être belle, mais tout le monde se moque de sa poitrine qui est maintenant assez basse pour reposer sur son ventre. Il y a

  1. Il y a toute une dynastie de musiciens du nom de Grua à partir du XVIIIe siècle, à Milan et en Allemagne.