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orateurs rhénans exhalent les mêmes rancunes et font eux aussi le procès de l’administration prussienne. Lenning, chanoine à Mayence, sa ville natale, et Hardung, conseiller au tribunal de Cologne, rappellent avec indignation l’infâme traitement qu’a dû subir l’archevêque Droste.

On voit déjà ce qu’il faut penser de l’affirmation de K. Schurz, selon laquelle le mouvement unitaire de 1848 aurait raccommodé les Rhénans avec la Prusse. Si l’on recherche ce qui se produit dans la région pendant cette période, il apparaît clairement que la question nationale passe au second plan et qu’il s’agit avant tout de ruiner la puissance prussienne. Le gouvernement de Berlin s’en rendit d’ailleurs parfaitement compte : sa crainte de voir la province rhénane lui échapper fut telle qu’au cours de l’année 1849 il en nomma gouverneur le « prince Mitraille » en personne : le futur Guillaume Ier vint alors s’établir à Coblence.

Une première phase est celle qui s’étend des premiers jours de mars au début de juin 1848 ; elle embrasse le soulèvement initial, les répercussions des événemens de Berlin, les élections, toute l’agitation que provoque la réunion de l’Assemblée de Francfort. Viennent ensuite quelques manifestations isolées. Un dernier groupe de faits prend place au moment où Frédéric-Guillaume IV refuse la couronne impériale et dans les semaines qui suivent. Quoique les monographies publiées soient peu nombreuses et qu’elles présentent de fortes lacunes, — souvent intentionnelles, — elles nous en disent assez pour que nous soyons pleinement édifiés.

A Aix-la-Chapelle, au mois de mars 1848, la population tourne sa colère contre le 34e régiment d’infanterie dont les hommes sont recrutés en Prusse, à Dantzig et à Elbing. Le 15 avril, les habitans prennent d’assaut le poste de garde sur le marché ; le 16, ils assiègent la caserne ; le 17, ils attaquent les troupes à coups de pierres ; les soldats tirent et tuent deux personnes, tandis qu’une charge de dragons fait quarante prisonniers. Les membres du Landtag-uni, dès les premiers jours de la fermentation révolutionnaire, par l’intermédiaire du président supérieur de la province, ont supplié le roi d’accorder sans retard au peuple pleine et entière satisfaction, sous peine de voir éclater partout des conflits sanglans. C’est l’armée prussienne qui est l’ennemie, et de Trêves à Emmerich, le sentiment