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la première fois à l’entreprise de salut dont il célébrait l’un des premiers succès. » Quelques mois après, un second cercle était inauguré à Montmartre ; la même année, deux cercles étaient fondés à Lyon. Partout où on l’appelait, — et sa réputation naissante d’orateur avait vite franchi l’enceinte un peu étroite de ses premiers auditoires, — Albert de Mun se rendait pour-porter la bonne parole. A la suite de ces réunions, des cercles se fondaient sur le modèle des premiers cercles parisiens. Au mois de mai 1873, ils étaient assez nombreux pour que l’Œuvre pût tenir sa première assemblée générale. Deux ans après, au mois de mai 1875, lors de la troisième assemblée générale, l’Œuvre comptait cent trente comités, cent cinquante cercles, dix-huit mille membres, dont quinze mille ouvriers. Le dévouement chrétien, l’activité, l’éloquence avaient produit ces magnifiques résultats.

L’apostolat religieux et social d’Albert de Mun s’était développé comme en marge de son métier militaire, et n’avait nui en rien à ses obligations professionnelles. Nommé, en 1872, capitaine au 9e régiment de dragons, en garnison à Meaux, il permuta, deux ans plus tard, avec le 2e régiment de cuirassiers, qui tenait garnison à Paris. Bien qu’il s’abstint, dans ses discours et conférences, de faire de la politique, ses idées politiques étaient alors assez arrêtées. Après l’Empire, la guerre et la Commune, la restauration monarchique lui paraissait le salut de la France : il était, « par raison comme par éducation, royaliste d’opinion et de désir ; » il l’était aussi par conviction sociale, car il voyait dans le comte de Chambord l’antithèse vivante de cette Révolution, à laquelle il avait déclaré la guerre. Mais l’Assemblée nationale trompa ses espérances, et divers incidens pénibles lui ayant fait craindre pour l’avenir un moindre libéralisme de la part de ses chefs et du gouvernement, d’autre part, diverses ouvertures lui ayant été faites pour l’entrée dans la vie politique, il crut devoir, non sans de longues hésitations, reprendre toute sa liberté, et, à la fin de 1875, il donna sa démission d’officier. Il avait fait, au cours de ces dernières années, son apprentissage oratoire ; la vie publique l’attirail ; il crut qu’à la tribune de la Chambre il travaillerait avec plus d’efficacité au triomphe des idées catholiques et sociales dont il était le champion. Un groupe considérable d’électeurs de l’arrondissement de Pontivy lui ayant offert une candidature