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REVUE LITTÉRAIRE

LA « MODERNITÉ » DE BOSSUET[1]

La modernité de Bossuet, c’est le titre du célèbre discours prononcé à Rome, au palais de la Chancellerie pontificale, en 1900, par Ferdinand Brunetière ; et c’est aussi le sujet d’un récent Bossuet, tout à fait remarquable et dont Brunetière eût approuvé sans doute la principale idée. Bossuet, dit Brunetière, « c’est le guide et c’est le maître, c’est le conducteur d’âmes, c’est le directeur d’esprits, c’est le penseur dont les leçons n’ont pas cessé ni jamais ne cesseront d’être actuelles, d’être vivantes… Il nous arrive trop souvent, à nous autres Français, d’ensevelir nos morts fameux dans le linceul de leur propre gloire ; ils ne nous deviennent pas précisément indifférens, mais nous ne vivons pas avec eux dans cette intimité quotidienne, étroite et familière qu’à défaut même de la religion, l’amour de la patrie devrait suffire cependant à entretenir. » Et M. Dimier : « Un génie que quelques-uns se sont amusés à nous dépeindre comme étranger à nos préoccupations, comme enseveli dans les temps révolus. Aucun n’est plus actuel, parce qu’aucun n’est plus sage, et la résurrection de la France le saluera comme un de ses maîtres. L’admiration qu’on lui vouait dans le passé aura pour suite illustre les bienfaits que nous tirerons de lui dans l’avenir. » D’ailleurs, je ne dis certes pas que M. Dimier doive à Brunetière le sujet de son livre ; et la comparaison des formules trouvées par l’un et par l’autre n’aboutit pas à diminuer l’originalité d’un livre qui est assurément original et de la meilleure manière, par la spontanéité intelligente de

  1. Bossuet, — « ouvrage honoré d’une lettre de Mgr l’évêque d’Arras, » — par M. Louis Dimier (Nouvelle Librairie nationale).