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de facile prétexte ; même il n’hésite pas à saisir les édifices catholiques pour les affecter à son culte : c’est ainsi que, le 25 février 1819, il s’empare à Trêves de l’église des Jésuites. Pour cette besogne de conquête confessionnelle, il n’est jamais à court d’argent. Il subventionne grassement la religion luthérienne, mais ce sont les catholiques qui doivent faire tous les frais de la leur, et qui doivent payer pour l’entretien et les réparations des bâtimens où ils prient. A cet effet, en vertu d’un Ordre de Cabinet du 13 avril 1825, ils sont soumis à des taxes spéciales ou Kathedralsteuer ; ils versent 25 pfennigs pour chaque baptême, 50 pour chaque mariage, 15 pour chaque service funèbre. Ce sont là des impôts supplémentaires que leur vaut leur qualité de non protestans.

Au fond, comme le remarque l’archevêque von Spiegel, tout le travail de la Prusse tend à établir une religion d’Etat et à anéantir le catholicisme dans le Rheinland. Quelques mesures d’un caractère tout spécial le démontrent avec la dernière évidence. Sans doute le gouvernement ne favorisera pas ouvertement l’hérésie de Ronge où il découvre une entreprise révolutionnaire, et il ne la reconnaîtra officiellement qu’en 1848, sous la pression des événemens. Du moins faut-il signaler plusieurs tentatives où percent ses intentions.

Le 27 septembre 1817, paraît un Ordre de Cabinet qui réunit en une seule Eglise évangélique chrétienne, — c’est le nom qu’elle a reçu, — les Eglises luthérienne et réformée, dans l’espoir d’y adjoindre plus tard le catholicisme : la liturgie évangélique, publiée en 1821 et retouchée en 1822, pénètre en 1843 dans la principauté de Birkenfeld. Puis la monarchie prussienne profite de ce que l’armée doit se plier à une obéissance toute passive pour forcer les troupes à recevoir un enseignement confessionnel uniforme. Un Ordre de Cabinet du 2 février 1810 exige que les soldats catholiques assistent une fois par mois à l’office protestant, afin de les habituer à l’indispensable respect qu’ils doivent témoigner à la principale religion de l’État[1]. Une ordonnance de 1832 confirme cette décision, observée jusqu’en 1840, atténuée dans la suite par diverses dispenses, après que les deux Landtags de Westphalie et de Prusse rhénane ont fait entendre leur protestation. cette même

  1. Textuellement : « Um sie an die nöthige Achtung fur die Hauptreligion des Staates zu gewöknen. »