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Dès le 24 août, alors que la bataille de Charleroi est à peine terminée et que la retraite commence dans les conditions les plus pénibles, Joffre dicte son plan nouveau : « La 5e armée a pour mission de reprendre l’offensive pendant que les autres armées contiendront l’ennemi. »

Directive générale qui oppose aussitôt la lumière et la confiance au trouble et au désarroi.

Une directive subsidiaire précise l’application : elle ordonne de maintenir la liaison entre toutes nos armées de l’Ouest ; et notamment entre la 5e armée et l’armée britannique qui ne doit, à aucun prix, être abandonnée à elle-même.

En un mot : ne pas être coupé, ne pas être tourné. Voici l’ordre daté du 24 août : « La 5e armée battra en retraite en prenant son point d’appui sur Maubeuge et en appuyant sa droite sur le massif boisé des Ardennes, en liaison avec la 4e armée qui replie sa gauche derrière la Meuse et avec l’armée anglaise dont la ligne de repli pourrait être en direction générale de Cambrai. »

Et cet ordre est transporté aussitôt sur le terrain : dès le 24 au soir, sous l’inspiration du haut commandement, le général de Langle de Cary ordonne au 9e corps de se tenir prêt à diriger la division marocaine sur Rimogne pour continuer, avec la 9e division de cavalerie, à assurer la liaison avec la droite de la 5e armée. La 4e division de cavalerie passe à la 5e armée pour assurer cette liaison. Et le 25, l’ordre général est donné : « La 4e armée s’établira demain sur la rive gauche de la Meuse, pour résister en restant liée à la gauche de la 5° armée. »

Ainsi, les forces alliées, 4e armée, 5e armée, armée britannique, etc., coopèrent en un tout fortement lié ; le mouvement général se fait, d’abord, dans une direction franchement Sud-Ouest, dont il est facile de comprendre les avantages : les armées en retraite s’appuient, toutes ensemble, sur des obstacles naturels, la Meuse et l’Oise ; elles protègent Paris ; elles maintiennent les contacts avec l’armée d’Amade et surtout, calant toutes nos forces de l’Ouest sur elles-mêmes, elles les ramènent vers leurs ressources et vers leurs renforts.

Ces premières décisions prises en vue des situations immédiates, le commandant en chef porte les yeux sur les événemens plus lointains et, en pleine défaite, il trace les grandes lignes de la reprise qui bientôt se transformera en victoire.