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de nos provinces leur tient particulièrement à cœur. N’ont-ils pas, durant les dernières semaines, profité des circonstances, pour réaliser les parts des propriétaires français de nos mines et les faire passer en des mains allemandes ? Ils s’assuraient ainsi à l’avance la propriété exclusive de notre sous-sol.

Ces expropriations (nous ferons bien, après la victoire, de ne pas oublier ce précédent) ne furent pas d’ailleurs les seules. Le gouvernement allemand a encore procédé à des ventes forcées des biens meubles et immeubles, non seulement des Français, mais aussi des Alsaciens-Lorrains arbitrairement dénationalisés par décret. Dans l’esprit de leurs auteurs, ces ventes doivent avoir un caractère définitif. Elles l’auraient certainement, si la question d’Alsace-Lorraine était réglée par l’octroi de l’autonomie aux provinces annexées.

Dans le nouvel État autonome, l’Allemagne, dont les ressortissans occupaient déjà tous les postes administratifs importans, détiendrait donc encore la plus grosse part de la richesse publique.

Dans ces conditions, l’autonomie ne serait plus qu’une abominable duperie, même au cas où elle irait jusqu’à un séparatisme purement apparent.

Ce que je tenais surtout à bien mettre en relief dans cet article, c’est que les revendications autonomistes des Alsaciens-Lorrains dans le passé ne sauraient être invoquées comme une acceptation, même conditionnelle, du fait accompli. Elles ne comportaient aucune reconnaissance de l’annexion, mais marquaient simplement notre volonté de sauvegarder relativement notre indépendance jusqu’au jour, impatiemment attendu, de la libération définitive de notre pays. Nous étions comme des prisonniers qui ne cessent pas d’aspirer à la liberté, parce qu’ils essayent d’aménager à leur convenance la cellule dans laquelle on les retient de force.

Les Allemands perdent donc leur temps et leur peine en suggérant des solutions transactionnelles dont nous ne voulons rien savoir. L’Alsace-Lorraine aspire à redevenir française. Elle le redeviendra. Encore est-il intéressant de constater que l’Allemagne qui, hier encore, dans l’ivresse de la victoire escomptée, menaçait les Alsaciens-Lorrains de démembrer leur