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constamment d’Angleterre vers la France comme les charbons, les laines, les cotons, les cuirs, etc. ?

Que fut-il devenu plus encore, le tunnel attirant à lui tous les transports à destination ou en provenance de l’Orient pendant la guerre ?

Si l’on songe que le déplacement d’une chose ou d’un voyageur d’un point intérieur de l’Angleterre à un point intérieur de la France ou du Continent ne nécessite pas moins de six opérations d’embarquement ou de débarquement[1], on arrive à un chiffre de milliards d’opérations de manutention que le tunnel sous la Manche eût évitées, et quelle manutention ! Se représente-t-on suffisamment ce que c’est que l’embarquement et le débarquement du matériel de guerre des armées modernes, avec tous les préparatifs rendus nécessaires par les variations de marée, le nombre de bras à utiliser, le nombre d’engins à mettre en action, comme lorsqu’il s’agit d’une pièce de grosse artillerie ou de l’un de ces tanks monstrueux ? En réalité, quand on parcourt les splendides organisations des services de l’arrière de l’armée anglaise, on demeure absolument confondu à la pensée de l’effort et de la main-d’œuvre dépensés rien que dans le transport des matériaux et des stocks accumulés. C’est là que l’on touche du doigt la simplification gigantesque que le tunnel eût permise, en présence de ces abondances extraordinaires de vivres, d’armes, de munitions, de dépôts d’infanterie, de dépôts de munitions, de parcs d’artillerie de tous calibres, de parcs d’automobiles, de centres d’aviation, d’écoles d’instruction, devant ces véritables villes blanches (camps et hôpitaux sous la tente), créées en pleine campagne, devant ces infirmeries pour chevaux, des voies ferrées absolument nouvelles, des files interminables de docks, tout cela constitué avec une opulence qui nous paraissait être du luxe au début de la guerre et qui atteste simplement l’esprit de prévoyance de nos alliés.

Il y a là une dépense de main-d’œuvre fantastique que le tunnel eût épargnée en grande partie.

De même, quelle économie de tonnage à peine imaginable

  1. 1° Embarquement sur chemin de fer au départ en Angleterre ; 2° débarquement au port anglais d’arrivée ; 3" Réembarquement sur navire ; 4° Débarquement au port français d’arrivée : 5° Réembarquement sur chemin de fer ; 6° débarquement à destination.