qui ouvre à l’étranger ses portes, mais surtout son cœur. Ils ont la tendresse, et la gaieté légère, et la fantaisie, sans rien qui pèse et qui pose. Ils ont de la musique dans l’âme…
Toute une partie de l’œuvre de Wyzewa appartient à la critique musicale. Et ce n’était pas la moins importante : il a, en collaboration avec M. Saint-Foix, consacré à Mozart un travail considérable et qu’il tenait pour son ouvrage principal, le seul ouvrage de longue haleine auquel il se soit contraint. En maintes occasions, il est revenu à l’étude de Beethoven, qu’il considérait comme le plus grand génie qui eût paru dans l’humanité. On m’approuvera de laisser de côté ce chapitre : l’incompétence elle-même a ses limites. Mais littérateurs, peintres ou musiciens, c’était de la même manière qu’il les étudiait : pour la merveille de leur art et pour le trésor de leur humanité. Et ce qu’il goûtait en eux, c’était l’élan qui les emportait d’un libre essor vers les réalités supérieures du rêve et de la poésie.
Je ne dis rien ici de ses romans, laissant à M. André Beaunier le plaisir d’en parler tout à loisir. Et la place me manque pour étudier son style, sa phrase longue et sinueuse, caressante, enveloppante, où toutes les nuances de la pensée et du sentiment se reflétaient comme dans le miroir d’un fleuve abondant et limpide. Mais il est un aspect de son talent qu’il est impossible de ne pas rappeler en quelques mots : c’est sa virtuosité de traducteur. Nulle part ailleurs il n’a montré plus d’originalité et de hardiesse, car là il a pris nettement le contre-pied des idées reçues, et reçues dans le public comme dans le monde des traducteurs. On sait ce qu’est devenue de nos jours la « traduction, » sous l’influence des mêmes idées pédantesques qui ont, pendant toutes ces dernières années, desséché et faussé notre enseignement. Sous prétexte d’exactitude, on exige des traductions littérales. Rendez le mot par le mot et la phrase par la phrase, sans quoi vous serez accusé de liberté grande et de fantaisie coupable. Le résultat est un mot à mot pareil à celui que nous faisions du temps que nous étions écoliers. Ce n’est pas une traduction, c’est une « version, » où, pour éviter le contre-sens, on se condamne à un perpétuel non-sens. Sans vergogne, le traducteur met sous la