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toujours… Soyez son interprète auprès de vos concitoyens, et dites-leur que Sa Majesté leur offre, au nom de la patrie et en son nom, les tristes et dernières assurances de ses regrets et de son amour… »

Le ministre, secrétaire d’État de l’Intérieur,

VAUBLANC.


En récompense de leur bravoure et de leur fidélité patriotique, les Sarrelouisiens étaient livrés à l’ennemi qu’ils avaient refusé de laisser entrer dans leurs murs ; l’héroïque général Thomas, qui avait si intrépidement voulu conserver Sarrelouis à la France, finit la sa carrière militaire et brisa son épée. ne a Cheminot (Moselle), le 7 juin 1770, il se retira à Ars-Laquenexy, auprès de Metz où, comme Cincinnatus, il s’occupa obscurément d’agriculture jusqu’à sa mort.

Disciplinés autant que courageux, ses soldats, comme les habitans de la ville sacrifiée, se soumirent aux ordres reçus, la. mort dans l’âme et en versant des larmes de colère. Une convention fut conclue, le 30 novembre, entre le commissaire royal prussien, général-major von Steinmetz, et les commissaires français dont le chef délégué fut le colonel d’artillerie Marion. Les troupes françaises, soldats et douaniers, sortirent de la place, en rangs silencieux, et se dirigèrent sur Metz, sous le contrôle humiliant d’un officier prussien qui les escorta jusqu’au bout de leur calvaire. Elles obtinrent toutefois les honneurs de la guerre ; elles se retiraient avec armes et bagages. Le 2 décembre 1815, le commissaire prussien Mathias Simon s’installa au gouvernement de la place qu’on dénomma Preussich-Saarlouis.

L’exposé pur et simple des événemens est plus éloquent que tout commentaire. Quand ce drame poignant, qui reste dans l’histoire une infamie, s’accomplit, il y avait quatre mois et demi que Napoléon était prisonnier des Anglais et un mois et demi qu’il était arrivé à Sainte-Hélène. On ne peut donc, pour justifier le crime prussien, prétexter les précautions à prendre contre Napoléon. En 1871, les petits-fils de ces Prussiens n’osèrent point insister pour qu’on leur livrât Belfort qui fut conservé à la France à cause de son héroïque défense. Sarrelouis ne méritait-elle pas, pour la même raison, d’être laissée à la France ? Est-ce que les habitans de la petite ville lorraine