LE CHŒUR. — Derrière lui Kumagai no Jiro Naozane,
Ne voulant pas le laisser échapper, accourt à sa poursuite, Atsumori
Alors fait retourner son cheval.
Parmi les heurts des vagues, il tire son sabre ;
On le voit frapper deux fois, trois fois ; puis sur leurs chevaux
Ils se saisissent à bras le corps ; et sur la lisière où viennent
Battre les flots, ils tombent l’un sur l’autre. A la fin,
Atsumori est frappé et meurt. De la vie qu’il a perdue
Le karma, d’un tour de sa roue, les remet en présence.
« Mon ennemi, le voilà ! » crie-t-il, et il veut le frapper. Mais
Celui-ci, rendant le bien pour le mal,
Récite les invocations rituelles, et, grâce à ses prières,
Finalement ensemble ils renaîtront
Sur le même lotus. Non, le moine Rensei
N’est pas son ennemi.
Ah ! daignez encore prier pour ma délivrance !
L’esprit d’Atsumori, dans le pas rythmé de la danse, avait marché, le sabre haut, sur le moine frottant son rosaire entre ses mains étendues. Le « karma » agissant, il recule, retombe, puis, jetant son sabre, et, les mains jointes dans l’attitude de la prière, se tourne vers le moine pendant le chant du dernier vers. — Tous deux, la victime et son meurtrier, sont désormais réunis, et, selon la magnifique expression bouddhique, renaissent sur le même lotus.
Après un court entr’acte pendant lequel, et pour détendre l’esprit et l’âme des spectateurs, est joué un intermède comique (kyôgen), — une nouvelle introduction instrumentale retentit. C’est le troisième Nô qui commence, le Nô appartenant à la classe des pièces dont le héros principal est une femme (kazura-mono), l’esprit d’une morte, ou un esprit apparaissant sous une forme féminine.
Le Nô de cette série, ici représenté, est le Nô de Sotoba-Komachi, Komachi au stupa, c’est-à-dire de la poétesse du IXe siècle, célèbre par sa beauté et son talent, mais aussi par ses malheurs, et qui, après une jeunesse brillante, et pour avoir, par sa coquetterie et ses cruautés, réduit au désespoir et à la mort l’un de ses amans passionnés, le noble général de