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efforts en vue de rendre notre production plus abondante, le système du maximum, inauguré de nouveau en France, paralyse les bonnes volontés et brise le ressort de l’intérêt personnel. Cet intérêt personnel, ce désir du gain légitime correspondant, aujourd’hui, à des efforts extraordinaires, est pourtant seul capable de déterminer des actes, partout, au même moment, sans violences et sans menaces. Quelle est la loi qui peut exercer une pareille action et rallier sans difficulté toutes les opinions ?

Il y a plus. Sous l’étreinte de la nécessité représentée par la cherté, la production peut être accrue en obligeant partout les moins fortunés à travailler pour se procurer les alimens dont ils ont besoin.

Il n’est pas de commune rurale qui ne puisse mettre à la disposition des artisans, des journaliers agricoles ou industriels, des familles nombreuses, une dizaine d’hectares prélevés sur des terres communales, sur des domaines ruraux dont quelques parties, sans être réellement délaissées, sont soumises cependant au système de la jachère ou de la dépaissance. En mettant ces parcelles à la disposition de ceux qui voudraient les cultiver, on augmenterait comme par miracle, sous la seule pression du besoin et de l’intérêt personnel, nos ressources en pommes de terre, en légumes verts ou secs, sans compter les grains eux-mêmes dont quelques ares ensemencés peuvent porter une récolte capable de nourrir toute une famille pendant un an. Pour cela, la réquisition est inutile ; il suffit d’indemniser les propriétaires après entente amiable, et de se confier aux suggestions de l’intérêt personnel. Ceux qui ont besoin d’augmenter leurs ressources n’hésiteront pas à travailler dans ce dessein.

À un autre point de vue, au point de vue des économies à réaliser, le système de la taxation n’est pas moins critiquable, car il supprime l’effort nécessaire. Bien entendu, nous ne songeons pas à rationner le pauvre en réduisant la quantité des alimens qu’il serait capable d’acheter ; mais nous songeons à ces substitutions d’alimens qui correspondent à de véritables économies et à une meilleure utilisation des ressources disponibles. Nous avons prouvé, — croyons-nous, — que ces ressources, par tête d’habitant, étaient encore supérieures aujourd’hui à celles dont disposaient nos pères il y a soixante ans, quand on tient compte de la production nationale.