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O désordre savant, beauté capricieuse,
Œuvre d’art si fragile, et par là précieuse,
Où chaque arbre qui meurt altère le tableau,
Découronnant le temple et dépossédant l’eau !

Dans ces jardins d’amour tout est grâce et caresse,
Mais la femme en ces temps n’est-elle pas maîtresse ?
Or voici son miroir où se peint le reflet
Des caprices sans nombre où sa beauté se plaît.




Dès l’horizon de rêve aux ormes contenue,
O VERSAILLE immortel, c’est dans votre avenue
Qu’autrefois s’avançait, à vos fastes promis,
Plus d’un ambassadeur par avance soumis.

Et voici, solennel, et la grille franchie,
Le palais de la Gloire et de la Monarchie,
Etincelant jadis, aujourd’hui déserté.
Temple de Souvenir, asile de Beauté.

Versailles... aussitôt l’image éblouissante
Des miroirs endormis ou de l’eau jaillissante
Apparaît à nos yeux, royaume où tant de fleurs
Aux buis enveloppans proclament leurs couleurs.

Divinité de l’art, debout sur la terrasse.
Vous réglez l’infini que votre vue embrasse :
Tout à l’entour de vous, fuyant aux horizons.
Vos perspectives sont comme autant de rayons !

Escaliers de Titans, « Cent Marches » fabuleuses,
Vous montez lentement aux cimes merveilleuses.
Au château qui s’avance à son miroir tremblant
Fleuri de bronze noir, bordé de marbre blanc.

Le sommeil des gazons et la lueur des marbres
S’enchâssent aux accueils de l’allée et des arbres,
Tandis que noblement de leur rythme ont vibré
La statue à la rampe et le vase au degré.