Page:Revue des Deux Mondes - 1917 - tome 40.djvu/740

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

allemand a cru devoir s’expliquer par un communiqué daté du 18 août et intitulé : « Le cas de Liège. »


Communiqué allemand du 18 août. — LE CAS DE LIÈGE. Le quartier général dit que le secret de Liège peut maintenant être dévoilé. Les Allemands avaient reçu, avant la déclaration de guerre, l’assurance que des officiers français, et peut-être aussi des troupes, avaient été envoyés à Liège avec la mission d’instruire les troupes belges sur le service des forts. Avant l’ouverture des hostilités nous n’avions rien à dire de cela. (Vous voyez le raffinement de mensonge et d’hypocrisie ; mais il est nécessaire pour en arriver aux explications qui suivent.) Dès le début de la guerre, cela constituait une violation de la neutralité de la France vis-à-vis de la Belgique. Les Allemands devaient agir rapidement. (Donc « le cas de Liège » n’est nullement prémédité ; c’est tout à fait à l’improviste et pour parer à un danger, d’ailleurs inventé à plaisir, que l’Allemagne croit devoir se jeter sur cette place, Liège étant remplie de Français.) Des régimens non mobilisés furent jetés à la frontière et mis en marche sur Liège. Six faibles brigades avec un peu de cavalerie et d’artillerie prirent la ville. Deux autres régimens, qui venaient de terminer leur mobilisation, purent aussi être envoyés. (N’insistons pas sur ces révélations et ces explications aussi fausses qu’embarrassées.) Nos adversaires annoncèrent que, devant Liège, se trouvaient 120 000 Allemands ne pouvant continuer leur marche en avant, en raison des difficultés du ravitaillement. Ils se trompaient ; car cette pause eut d’autres raisons. C’est seulement alors que commence la marche en avant des Allemands. Nos adversaires auront la preuve que nous ne l’avons entreprise que bien soignés et bien équipés. L’Empereur a tenu sa parole de ne pas sacrifier inutilement une goutte du sang allemand (Cela pour répondre à l’émotion causée en Allemagne par les pertes devant Liège, 42 000 hommes.) L’ennemi ignorait nos puissans moyens d’attaque ; c’est pour cela qu’il se croyait en sûreté dans les forts... La forteresse de Liège ne servira plus les plans primitifs de nos adversaires, mais sera un point d’appui pour l’armée allemande.


Nous ne sommes pas obligés de prendre pour argent comptant ces explications alambiquées. Le haut commandement voudrait faire croire (surtout au public allemand) qu’il s’est jeté en hâte sur Liège et qu’il s’est emparé de la ville, au prix d’une cruelle effusion de sang, pour y capturer une garnison française. Fait extraordinaire : une fois la ville prise, cette garnison s’est évanouie. Non, la prise de Liège a un autre sens : cette place est la clef de toute la campagne. On s’empare des ponts tout