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ne partent pas, et les membres du gouvernement provisoire, qui ne devaient pas partir, sont partis. Le prince Lvoff lui-même s’est retiré. M. Kerensky, président du Conseil, ministre du Salut public, n’est plus seulement la voix, il est la tête de la Russie. Elle n’en a pas de rechange ; qu’il la garde bien au milieu des défections, des trahisons, des attentats dont il va être la cible, de toute cette folie anonyme et de toutes ces conspirations pseudonymes où les Lénine ne s’appellent pas Lénine, où les Zinovieff s’appellent Apfelbaum, les Kameneff, Rosenfeld,et à qui l’argent vient de Berlin par Stockholm. Peut-être l’heure et l’œuvre réclamaient-elles sa jeune et farouche énergie. Après tout, la Montagne sauva la France par des moyens que la Gironde n’eût pas employés. Si Kerensky est tout ensemble Danton et Carnot, comme on le dit, ce n’est pas trop pour animer et pour organiser tout ce qui, dans la Russie en désarroi, doit être réanimé et réorganisé.

En Angleterre, M. Winston Churchill est rentré dans le cabinet. Quelques changemens ont été introduits, qui n’ont rien changé à la politique. M. Lloyd George a répliqué, comme il aime à le faire, au maiden speech de M. Michaelis. D’une chiquenaude, il a réduit en poudre l’édifice branlant de cette logomachie. Si le Chancelier allemand désirait avoir, sur la guerre navale, sur les disponibilités et les dispositions de la Grande-Bretagne, des faits et des chiffres, il les a. — En Espagne, à Barcelone, le 19 juillet s’est passé mieux qu’on ne l’aurait cru, dans le calme relatif de la rue et des esprits. Une seule barricade, un seul mort ; un manifeste courtoisement remis au gouverneur, et la séance levée. Mañana, on verra demain. — En Chine, l’infortuné Pou-Yi est détrôné aussitôt que restauré. Il aura connu, dès sa petite enfance, les vicissitudes humaines. Cet Empereur de huit ans, pour son second essai, aura régné huit jours. Mais nous, apprenons, par cet exemple, à ne pas philosopher sur les empires et les révolutions, avant que les révolutions se soient rassises et que les empires se soient consolidés.


CHARLES BENOIST.


Le Directeur-Gérant,

RENÉ DOUMIC