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L’ALSACE-LORRAINE À LA VEILLE DE LA DÉLIVRANCE.

conseils généraux des trois départemens, en partie par les conseils municipaux des quatre grandes villes et par les délégués des conseils municipaux des autres communes, à raison d’un député par arrondissement. Le Landesausschuss (c’est le nom de cette assemblée) vote le budget et les lois du pays. La présentation est faite par le gouverneur, ou Statthalter, au nom du conseil fédéral. C’est le Bundesrath qui approuve les lois que l’Empereur promulgue. À tout moment le souverain-délégué peut intervenir pour suspendre l’action législative. De plus il peut en appeler, quand bon lui semble, du Landesausschuss au Reichstag, qui alors siège comme Chambre particulière pour l’Alsace-Lorraine.

En 1911, nouvelle transformation. Le Conseil fédéral et le Reichstag sont éliminés de la législation de l’Alsace-Lorraine. Deux Chambres sont créées dans les pays annexés. La seconde est élue au suffrage universel, direct, égal et secret, à raison d’un député par canton. Elle comprend soixante membres. La première, ou Sénat, se compose, par moitié, de membres nommés directement et pour la durée d’une législation par l’Empereur, de sept membres de droit (fonctionnaires supérieurs) et de onze sénateurs élus par des corporations officielles. L’Empereur exerce tous les pouvoirs souverains. Il nomme et révoque à sa guise le Statthalter et ses collaborateurs du ministère, dispose d’un droit de veto absolu, peut, en cas de conflit entre le gouvernement et le parlement, suspendre l’action législative et prélever les impôts, comme engager les dépenses sur la base de l’exercice précédent, enfin promulguer des décrets qui ont force de loi jusqu’au moment où les Chambres seront de nouveau réunies. Cette Constitution a d’ailleurs un caractère très net de précarité, puisqu’elle reste une loi d’empire réformable et que Bundesrath et Reichstag peuvent la modifier quand bon leur semblera.

À noter que, jusqu’en 1911, le Statthalter conserva tous ses pouvoirs dictatoriaux, c’est-à-dire que l’Alsace-Lorraine fut régie par la loi française sur l’état de siège de 1849. Lorsque l’affaire de Saverne eut ravivé toutes les vieilles oppositions nationales, le comte de Wedel pensa un moment à rétablir la dictature. La publication anticipée du projet de loi, qu’il avait déjà déposé au Conseil fédéral, empêcha heureusement ce projet d’aboutir.