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contre la résolution des « demoiselles au pompon rouge » et de leur amiral. Tandis que derrière eux les marmites venaient tomber sur la malheureuse ville, Belges et Français tenaient bon : les soldats belges de l’héroïque colonel Jacques, commandant le 12e de ligne, se battaient avec plus de flegme que nos marins qui, excités par la lutte, les étonnaient par leurs cris : On va en moudre, répétaient-ils, tandis que les mitrailleuses jetaient par terre des files d’Allemands attaquant à rangs serrés.

Le 21, l’effort allemand redouble, — devant Nieuport, cette fois. Entre Saint-Georges et Shoorbacke, d’autre part, l’ennemi se ruait, ainsi que vers Tervaete. La boucle de l’Yser était très menacée. L’artillerie allemande faisait de cruels ravages. Déjà il fallait engager les réserves belges et on n’était qu’au troisième jour de combat. A Dixmude même, où on tenait si bien, ce n’était pas sans « casse, » pour parler comme les marins : l’artillerie allemande y croisait ses feux de Woumen et de Keyem. Tiendrait-on ? Une vague inquiétude se répandait des Dunes à Dixmude.

Mais ce soir du 21, un bruit courait de Furnes à Nieuport, à Ramscapelle, à Tervaete, à Dixmude : « Les Français arrivent. » C’était Grossetti, la 42e division, et soudain, à la nuit, dans Furnes angoissé, une éclatante fanfare de clairons ébranlait les vieux murs et réveillait les espoirs. C’était le 16e bataillon de chasseurs à pied qui, au son de la Sidi-Brahim, « avec une splendide allure guerrière, » faisait son entrée, avant-garde de Grossetti. Le roi Albert sortit de l’hôtel de ville pour saluer l’arrivée des vainqueurs de Fère-Champenoise qu’assaillait l’enthousiasme « indescriptible » de la foule. Le général Grossetti venait de se présenter au Roi. Et, de Nieuport à Dixmude, l’arrivée de la célèbre division surexcitait tous les courages. Sur la mer, ce soir-là, un sourd grondement se fit entendre. Les monitors de l’amiral Hood et les contre-torpilleurs français donnaient de la voix. La vraie bataille de l’Yser s’engageait.

A cette heure, la bataille française des Flandres commençait aussi, puisque se constituait l’état-major du détachement d’armée de Belgique qui, sous les ordres du général d’Urbal, allait prendre en main la direction des opérations entre la bataille belge et la bataille anglaise.