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achever de clore de la Lys à la mer, ce mur qui déjà des Vosges aux collines d’Artois se dresse devant l’envahisseur, mais aussi s’élancer, par une offensive combinée des armées alliées, à la reconquête de la Belgique. Mais si cette offensive, se heurtant à une poussée allemande, plus forte qu’on n’avait pu l’imaginer, se trouve contrariée, du moins arrêtera-t-elle, au seuil des champs de bataille même, les efforts allemands et brisera-t-elle, avec cet effort, pour de longs mois, la force offensive de l’ennemi. Et si, cependant, les armées alliées ont conservé au roi des Belges fût-ce quelques lieues carrées de son royaume, si elles ont, en faisant échouer les projets sur Dunkerque et Calais, assuré la pleine liberté des communications entre la France et l’Angleterre et, à tout jamais, couvert la Grande-Bretagne, si enfin elles ont, tout en combattant, solidement fermé la barrière défensive derrière laquelle la France se pourra préparer à de nouveaux combats, elles auront remporté tout à la fois sur l’orgueil, la force et la fortune de l’Allemagne la plus grande victoire.

A cette victoire tout sera donc employé. Si, dès les premiers jours, l’intérêt de cette bataille est clairement apparu au haut commandement français, il est certain qu’en se développant, se magnifiant et s’aggravant, elle s’imposera, à la fin d’octobre, à son attention comme la bataille — tout court. Le grand quartier général qui, dès la seconde semaine d’octobre, songe déjà à étayer d’importantes forces les armées belge et anglaise, est peu à peu amené à doubler, tripler bientôt ces forces. Relevant sur les parties stabilisées et relativement calmes du front, régi mens, divisions, bientôt corps d’armée, — on verra tout à l’heure lesquels, — il constituera au général d’Urbal une armée vite si importante, que, nos alliés aidant, l’énorme masse allemande se viendra briser là contre, comme, dix-huit mois plus tard, devant Verdun.

C’est bien plutôt en effet à la célèbre bataille de la Meuse de 191G qu’à celle de la Marne de 1914, qu’il est permis de comparer la bataille des Flandres, premier type de ces grandes mêlées où les corps viennent des deux côtés s’ajouter aux corps, mêlée forcément échevelée, d’apparence désordonnée, remplie de hauts et de bas, de coups de théâtre, de reculs et de rétablissemens, se terminant par la déconfiture allemande, mais au prix de quels efforts surhumains ! C’est ce qui me ferait dire que la