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découverte de Christophe Colomb, les descendans des émigrans du Royaume-Uni fondèrent entre le Canada et les embouchures du Mississipi la république des Etats-Unis, eux aussi, ils eurent d’abord pour politique d’écarter d’eux l’Europe et de ne pas intervenir eux-mêmes dans les affaires européennes. Tels furent, à l’origine, le sens et le but de la doctrine formulée en 1823 par le président Monroe. Or, il est arrivé que ce sont les Etats-Unis qui ont les premiers, de 1840 à 1853, successivement ouvert au commerce et aux rapports internationaux la Chine, la Corée, le Japon. Et c’est le président Wilson qui aujourd’hui fait de la doctrine de Monroe la formule même de l’union entre l’ancien et le nouveau monde. « Je propose, disait-il dans un message au Sénat du 22 janvier dernier qui contenait ses vues sur la future paix, sur les garanties et sanctions de cette paix ; je propose que les diverses nations acceptent d’accord la doctrine du président Monroe comme la doctrine du monde, qu’aucune nation ne cherche à imposer sa politique à un autre pays, mais que chaque peuple soit libre de fixer lui-même sa politique personnelle et de choisir sa propre voie vers son développement. » Et il ajoutait dans son adresse inaugurale du 4 mars : « Nous ne sommes plus des provinciaux : les événemens tragiques des trente mois de guerre que nous venons de vivre nous ont constitués citoyens du monde. Toutes les nations sont également intéressées à la paix du monde, à la stabilité politique des peuples libres et sont également responsables de leur maintien. » C’est ainsi dans la région de l’univers jadis le plus fermée aux communications avec le dehors, et par l’initiative de la grande République du nouveau monde la plus rebelle par principe à tout accord avec l’Europe qu’aura été scellé, dans la présente guerre, le pacte d’alliance le plus vaste et le plus compréhensif qui ait jamais uni les hommes. Ce sera le grand et impérissable honneur du président Wilson d’avoir été l’initiateur et comme le prédicateur de cette nouvelle croisade. Ce sera aussi pour les deux nations de l’antique Asie, pour le Japon allié de la veille, pour la Chine qui a entendu l’appel des États-Unis, un titre glorieux d’avoir été, dans cette lutte, du côté de la justice et du droit contre la barbarie, du côté de la lumière contre les ténèbres.