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la France ou l’Angleterre, pourraient accorder à leurs colonies. Il réclame la porte ouverte. Enfin il préconise l’institution d’une Cour internationale chargée de juger les difficultés qui naîtraient pour l’application des tarifs et l’interprétation de la clause de la nation la plus favorisée.

Cet appel à une Cour de la Haye commerciale a une saveur toute particulière sous la plume d’un membre de ce Reichstag qui s’est associé avec enthousiasme aux plus monstrueuses violations du droit international. Se rendant compte d’ailleurs de la difficulté qu’éprouveront les belligérans à régler cette partie du futur traité de paix, l’auteur propose que les anciens tarifs douaniers et conventions commerciales soient remis provisoirement en vigueur jusqu’à la conclusion des accords définitifs. C’est la mentalité nouvelle qui commence à poindre chez les Germains. Pressentant la ruine de leurs plans de domination, ils voudraient revenir au statu quo ante bellum sur tous les terrains.

Dans le même ordre d’idées, un professeur de Leipzig, M. Franz Eulenburg, s’imagine que l’Allemagne retrouvera, après la guerre, la plus grande partie des débouchés qui lui étaient ouverts avant 1914. Il reconnaît toutefois le danger qui résultera pour elle de la rupture des relations personnelles, de l’impossibilité d’envoyer des représentans ou de fonder des maisons allemandes dans certains pays. Mais M. Eulenburg estime que ni la France ni la Russie ne pourront se passer des charbons westphaliens et rhénans, et que cette dernière aura besoin d’acheteurs germaniques pour ses céréales. Quant aux neutres, ajoute-t-il, ce serait une erreur que de leur accorder un traitement moins favorable qu’à l’Autriche et aux Etats balkaniques. Tout en reconnaissant la puissance formidable des Etats-Unis et celle du Japon, M. Eulenburg prétend que l’Amérique du Sud restera ouverte aux Allemands, qui seuls, dit-il, seront en mesure d’acheter les produits agricoles de ce continent en lui vendant des objets fabriqués. En Europe, une union douanière austro-allemande n’augmenterait pas la capacité d’achat de ces deux empires et diminuerait même plutôt celle de l’Autriche, dont le développement économique serait entravé.

Les espoirs fondes sur le Sud-Est européen et sur le chemin de fer de Bagdad paraissent très exagérés à M. Eulenburg. Peut-être la conquête de la Mésopotamie par les Anglais lui