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des siens qu’il devrait accuser de ces choix surprenans et dont nul ne peut soupçonner les atténuantes aberrations. « Le parti qu’a pris lord Bathurst de s’adresser au cardinal Fesch à Rome, et qui paraissait sage, fait-il écrire, s’est trouvé en défaut par l’effet de la surveillance exercée sur tous les membres de la Famille et de l’impossibilité où ils sont de correspondre avec la France. » Aussi le couvre-t-il lorsqu’il ajoute : « Tout ce qu’il est nécessaire de faire ne peut l’être que par l’intermédiaire du gouvernement anglais ou français. »

Soit que Mme de Montholon n’ose point présenter sa requête, soit qu’elle se heurte à des refus ou à des fins de non-recevoir, il ne se trouve personne qu’on connaisse parmi les hommes désignés par Napoléon qui consente à entreprendre le voyage. Reste Planat, — capitaine hier, aide de camp du Sage de la (Grande Armée, chef d’escadron ad honores, après Waterloo, — quelqu’un de la foule, quelqu’un de l’armée et du peuple, quelqu’un qui ne tient de l’Empereur ni titre ni dotation, quelqu’un qui ne l’a pour ainsi dire jamais approché et qui n’a participé à rien de son intimité ni de sa faveur. Repoussé par Fesch, il a accepté avec joie la proposition de Mme de Montholon : « J’espère, lui a-t-il écrit, que vous n’avez pas mis en doute un seul instant mon inaltérable dévouement et ma résolution d’aller partager la captivité du plus grand et du meilleur des hommes. » Mais il faut une démarche officielle qui vienne de Longwood, et, au 16 novembre 1820, Mme de Montholon n’a encore reçu aucune autorisation. Elle renouvelle en décembre sa demande de laisser partir Planat. « Dieu veuille que je réussisse, écrit-elle. Comme il n’y a rien à dire contre lui, qu’il n’est point marquant, qu’il n’a joué aucun rôle politique, si on le refuse, je serai forcée d’en conclure qu’on ne veut pas encore de remplacement. »

Enfin, l’autorisation arrive : elle est le 10 mai 1821[1] aux mains de Planat, qui écrit aussitôt à Madame pour prendre ses ordres, ceux du cardinal, du roi Louis et de la princesse Pauline. À cette lettre, le cardinal répond le 30 juin, au nom de sa sœur et au sien : « Elle me charge de vous répondre que nous ne pensons pas que vous deviez entreprendre le voyage auquel vous êtes décidé. Soyez certain que si l’on avait besoin de

  1. Cinq jours après que Napoléon est mort à Sainte-Hélène.