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nécessaires à sa police intérieure, il ne pouvait disposer de l’armée indispensable à sa nouvelle et subite tache. Ainsi donc, partout, au levant comme au couchant, des voisins désarmés en face d’une Allemagne coloniale dont voici les moyens militaires : 40 000 hommes encadrés de 12 pour 100 d’Européens auxquels viendra se joindre l’équipage du croiseur Kœnigsberg. Aux réguliers allemands s’ajoutent des irréguliers indigènes : Watusi, armés de flèches empoisonnées, spécialistes de la razzia, Mazui au chef orné de plumes d’autruche et fanatisés par l’ennemi. De l’artillerie en abondance, car depuis l’obusier de 110 jusqu’au « pom-pom » de 37 m., la gamme des calibres est complète. Plus tard, dix 105 utilisés sur voie ferrée et huit 37 viendront du Kœnigsberg. Puis encore, un navire forcera le blocus pour débarquer à Tanga des 37 du plus récent modèle ; 110 mitrailleuses enfin, tel est l’armement prêt, dès la première heure. L’infanterie, composée surtout d’Arabes musulmans, est entraînée, vêtue de kaki et munie de casques en liège. Toute cette masse se divise ainsi ; 15 000 hommes opèrent sur la frontière septentrionale, 5 000 menacent le Ruanda, de gros détachemens assaillent la Rhodésie, d’autres gardent les ports côtiers. A la tête de cette armée, un chef qui fit campagne au Cameroun et possède une grande expérience coloniale, le colonel von Lettow-Forbeck. Il sait, en outre, pouvoir s’appuyer au besoin sur des villes fortifiées comme Kigoma et Tabora.

Une telle supériorité de matériel et d’effectifs entraînés donne à l’ennemi l’inestimable avantage de l’initiative des opérations et, partout, les Alliés subiront dans une mesure inégale, mais constante, la morsure de l’invasion. Supporter pendant plusieurs mois les coups de l’adversaire, étant à peine capables de riposter, mais sans rompre toutefois ; derrière un faible rideau de troupes préparer la riposte, puis la victoire, telle fut en un mot la tâche des Anglais et des Belges en Afrique Orientale. En 1914, à peine y avait-il 8 000 soldats alliés capables de s’opposer à un ennemi cinq fois plus fort.


Au début des hostilités, entre l’océan Indien et le lac Victoria, à l’ombre du Kilimanjaro, roides « Alpes Africaines, » l’ennemi rassemble des troupes dans Moschi. Neuf cent