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dans le drap des manteaux, le velours des costumes de travail ou le lainage des jupes… Des lingères préparent des vêtemens de flanelle ou de toile, tabliers, jupons, chemises, camisoles, et jusqu’à des brassières et des bonnets de nouveau-nés ! Cet atelier n’est pas le seul qui fonctionne à Bruxelles ; il y en a actuellement cinq ou six qui alimentent plus d’une vingtaine de comptoirs et distribuent aux pauvres femmes du quartier le travail prépare. Celui-ci, tout confectionné, doit être rapporté quinze jours plus tard. Il est immédiatement payé, estampille pièce par pièce et dirigé vers le grand comptoir central, dans les vastes locaux du« Pôle Nord, » ancien Skating-Ring, spécialement aménagés à cet effet. De là, ces lots de vêtemens sont répartis, selon les besoins, dans la ville et en province, et sont expédiés aux œuvres spéciales qui en font la distribution.

L’Œuvre des Prisonniers de guerre compte aussi parmi les plus intéressantes. Peut-on songer sans frémir au martyre de nos compatriotes disséminés dans les camps allemands ? Nous savons les privations, les tortures morales, les représailles parfois qu’ils endurent depuis tant de mois, et, quoi qu’on puisse faire pour eux, il est bien difficile d’alléger leur sort. L’œuvre en question réussit pourtant à leur faire parvenir les vêtemens dont ils ont tant besoin, un petit supplément de vivres, et, surtout, le pain qu’ils réclament.

Toutes ces œuvres ne peuvent exister et se développer que par l’appui que leur accordent le Comité national de secours et d’alimentation et la Commission for Relief in Belgium (C. R. B.). Le premier s’est formé grâce à l’initiative de notre grand savant et philanthrope, M. Ernest Solvay, auquel s’adjoignirent les plus hautes personnalités financières et charitables de la ville. Le Comité américain se constitua un peu plus tard, et nous avons vu que les premières cargaisons importantes d’Amérique arrivèrent vers le 15 décembre 1914, à l’heure même où le pays allait manquer de tout. Ce fut l’influence américaine qui obtint de von der Goltz, le premier gouverneur allemand en Belgique, l’assurance formelle que les vivres importés seraient exemptés de réquisition de la part des autorités militaires et resteraient à la disposition exclusive des Comités.

Les deux Comités agirent toujours en collaboration intime et leur action s’étendit bientôt sur toute la partie occupée du pays. Elle s’exerce même actuellement dans le Nord de la