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n’est pas au bout de cette rupture diplomatique, — l’avantage de libérer nos grands et vaillans alliés de certaines craintes qu’exprimait très franchement M. Balfour, dans une lettre rendue publique au commencement de septembre 1915[1] et de les incliner par conséquent à la mise en jeu plus intensive des élémens les plus vigoureux de leur splendide armée navale.

Quelles sont donc, pour en venir aux faits, les armes sous-marines que redoutent, tant et non sans raison, il serait puéril de le nier, les grandes unités de combat ?… Ce sont, si nous les rangeons dans l’ordre croissant de leur « offensivité, » la mine automatique fixe, la mine dérivante et la torpille automobile ; la première n’entrant en action que si on la heurte ; la seconde allant au-devant de ce heurt, mais avec une très faible vitesse, — celle du courant marin, — et en marchant ainsi à l’aveuglette ; la troisième seule, s’élançant délibérément, comme un vivant et intelligent organisme, à la rencontre de la coque qu’elle prétend détruire.

Eliminons d’abord à peu près entièrement la mine automatique fixe, en ce qui touche les périls que courent les dreadnoughts. Dans la position que nous leur avons attribuée plus haut et qui leur revient logiquement d’après le caractère de « réserve tactique » que prend le groupe des bâtimens de cette catégorie, la mine fixe n’est pas à craindre. Celles que les Allemands avaient semées au début de la guerre sur certaines routes de navigation de la mer du Nord ont été depuis longtemps relevées et détruites. D’autres ont été semées encore qui furent draguées aussi, et la persévérance des chalutiers-dragueurs anglais ne s’est pas démentie, malgré la chasse spéciale que leur ont donnée les sous-marins ennemis à certaines époques. Des coups de filet particulièrement répétés avec le plus grand soin donneraient à cet égard, au Sud du Doggerbank, toute sécurité aux grands navires britanniques. Et la rapide succession de ces coups de filet empêcherait d’agir, dans ces parages, les sous-marins « mouilleurs de mines » que les Allemands emploient assez souvent, mais dont la capture semble relativement facile.

La mine dérivante, ou mine libre, est plus dangereuse, certainement. J’observe toutefois qu’il n’en est pas dans la

  1. Voyez le Journal des Débats du 7 septembre.