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eût peut-être été facile d’éviter, un bon nombre d’unités de combat de second rang, pourvues d’une très bonne artillerie de plein fouet et que l’on peut par conséquent classer dans ce que j’appelais tout à l’heure « la flotte de siège. » C’est d’ailleurs ce qu’on avait fait pour l’attaque des Dardanelles et cela très judicieusement. Mais, outre, qu’il manquait, là, les feux courbes que nous obtiendrons par les radeaux armés, ou toutes autres « bombardes, » outre que les circonstances locales étaient nettement défavorables à l’assaillant, dès le moment que celui-ci engageait une lutte d’artillerie au lieu d’exécuter un passage de vive force, on avait négligé un point essentiel, — faute, sans doute, de renseignemens complets sur les moyens d’action de l’adversaire, — qui était de défendre les bâtimens agissant dans le détroit même contre les mines dérivantes. Il est clair que l’on ne commettrait plus, aujourd’hui, la même faute.

Enfin, et voici qui est péremptoire, il ne faut pas engager les précieux dreadnoughts dans l’entreprise, tant que le gros de la flotte ennemie n’aura pas été définitivement mis hors de cause dans une rencontre qui, au surplus, ne tardera pas à se produire, car, pour une foule de raisons qui tombent sous le sens, cette flotte ne saurait assister, impassible, à l’attaque méthodique du littoral dont elle assume expressément la garde., C’est bientôt dit que l’on ne « sortira » que lorsque l’adversaire sera déjà fortement entamé par les mines et les sous-marins. Mais d’abord, il n’est pas du tout certain que les choses se passent ainsi, — et nous allons voir pourquoi, — ensuite, il y a « les impondérables, » il y a l’opinion publique, il y a la force des choses et l’entraînement inévitable. Ne l’a-t-on pas vu, justement, lors de la sortie du 31 mai ?

Mettons donc nettement les cuirassés géans en dehors des élémens de la flotte de siège. Leur rôle est, non pas de coopérer avec celle-ci, mais de la couvrir. C’est exactement ce qui se passe à terre dans les cas analogues : il y a le corps de siège et l’armée de couverture, du côté de l’assaillant, tandis que, du côté du défenseur, outre la garnison de la place, il y a l’armée de secours.

Revenons encore à notre bombardement pour noter que la technique moderne nous fournit un moyen d’action nouveau, une arme inconnue dans les guerres précédentes, l’appareil aérien. Et il est clair que, dans le cas qui nous occupe, ce sera