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le 26 août, ils fusilleront dans cette commune un malheureux, nommé Durand, capturèrent dix-sept otages, et s’apprêtaient à tout piller, lorsqu’ils se heurtèrent, tout près de là, au 5e bataillon de chasseurs, dont deux compagnies, résolues à se sacrifier jusqu’au dernier homme plutôt que de se rendre, furent littéralement fauchées par l’artillerie lourde des Allemands. Dans la commune de Saulcy-sur-Meurthe et à Anozel, les envahisseurs procédèrent au déménagement méthodique d’un château qu’un industriel du pays, M. Gillotin, avait généreusement transformé en ambulance ; ils tuèrent le curé de la paroisse, l’abbé Jeanpierre ; ils brûlèrent une quarantaine de maisons ; mais ils trouvèrent devant eux les soldats de notre 22e d’infanterie, descendus péniblement du col de Sainte-Marie-aux-Mines, ces héroïques fantassins de l’Isère et du Rhône, dont les restes, glorieusement ensevelis dans les cimetières d’alentour, attestent le sacrifice. Ce régiment avait déjà perdu son chef, l’intrépide colonel Angelvy. Sa mission était de contribuer à la défense du col du Haut-Jacques, que les Allemands voulaient atteindre par la route d’Anozel à Taintrux et à Rougiville. Parmi ceux qui combattaient dans les rangs du 22e régiment d’infanterie, il y avait, entre autres braves, un professeur de la faculté des sciences de Lyon, le normalien Jean Merlin, lieutenant de réserve, glorieusement tombé au col d’Anozel, retrouvé, quelques jours après, à la lisière d’un bois, près de Foucharupt. Déjà les morts glorieux du 140e régiment d’infanterie commençaient à peupler le cimetière de Saint Michel-sur-Meurthe, où un bon Français, M. Adolphe Tisserand, domicilié dans cette commune, a veillé avec un soin touchant sur leur ensevelissement et leur sépulture. Le 140e régiment d’infanterie, soutenu par le 11e bataillon de chasseurs alpins, a retardé, tant qu’il a pu, l’occupation de Moyenmoutier, où les Allemands entrèrent dans la terrible journée du 27 août, venant des bois de Saint-Prayel, et dessinant toujours leur mouvement concentrique sur Saint-Dié, à la recherche d’un nouveau Sedan. Du côté de Raon-l’Etape, le 14e bataillon, à peine revenu d’Afrique, ayant fait la guerre dans le Sud marocain, au-delà de Mogador, à travers des forêts d’arganiers, au pays des Anlloûs, arrêtait par une lutte corps à corps, dans les sapinières de Répy, l’avance des Bavarois, et réussissait à barrer la route aux ennemis, dont l’objectif était d’aborder la vallée de la Moselle par la route de