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attitude future. Des réponses européennes à sa note il ne retenait que ceci : aucun des belligérans n’a l’intention d’écraser son adversaire. Cela suffisait pour lui permettre d’espérer que la paix qu’il proposait pourrait un jour régner sur le monde.

En présence de ce document, la presse européenne s’émut à nouveau. Mais, comme pour la note, chacun revint peu à peu sur son impression primitive. Les peuples de l’Entente notamment, bien qu’absolument réfractaires à certaines doctrines, celle de la paix sans victoire par exemple, s’aperçurent vite de l’étroite parenté qui reliait leurs idées les plus chères à certaines idées de M. Wilson ; d’autres, il est vrai, leur paraissaient obscures, quelques-uns disaient contradictoires ; bref, l’harmonie de l’ensemble n’apparaissait pas.

On ne peut pas admettre cependant que M. Wilson ait arbitrairement réuni les idées de son message. Cela serait peu vraisemblable a priori. M. Wilson est un esprit de trop haute culture pour ne pas coordonner fortement ses pensées : si l’on a interprété ses notes de façons diverses et hésitantes, c’est peut-être qu’on les a mal comprises. On aurait cru, à lire les polémistes, qu’une seule question importât : les notes de M. Wilson démontraient-elles qu’il était favorable à l’Entente, ou favorable aux Empires centraux ? En réalité, cette question pour l’auteur des notes ne se pose pas. Il est probable que, sauf sur le point spécial retenu dans son message, M. Wilson a estimé que les réponses des États européens ne concordaient pas avec les questions posées par lui, et il a éprouvé le besoin de répondre lui-même en proposant in abstracto, pour arriver à la paix, le système, — car il s’agit bien d’un système, — qu’il considère comme le meilleur. En ami sincère de l’humanité, il a voulu répandre à travers le monde des théories qui lui sont chères, qu’il croit vraies, et qu’il suppose suffisamment universelles pour satisfaire les aspirations communes et être facilement comprises de tous. Ce n’est pas ici le lieu de juger ces théories ; on se contentera de les exposer et d’en rechercher la genèse.

Les deux déclarations de M. Wilson ne sont obscures qu’en apparence. Tout s’éclaire et devient logique si l’on se souvient que, dans sa carrière scientifique, M. Wilson, qui a professé le droit international, a dû côtoyer en mainte occasion les doctrines de Kant sur la paix perpétuelle, et si l’on admet que, les ayant adoptées, il en a fait son propre système. C’est donc à la