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concert, où l’on entend des compositions des membres des deux Compagnies, et diverses réceptions viennent égayer la sévérité du meeting. L’Académie et l’Institut ont coutume d’inviter à leur session l’élite intellectuelle de la société : il y avait bien, le 16 novembre, sept cents personnes rassemblées dans une salle d’un des grands hôtels de New-York.

C’est à une pareille réunion que M. Brieux lut, il y a deux ans, un morceau d’une inspiration très élevée qui obtint un très grand succès ; j’en ai trouvé le souvenir encore très vivant parmi les Américains qui avaient eu la bonne fortune de l’entendre.

J’eus la parole le premier : je donnerai donc d’abord mon adresse sur : « La fonction des influences étrangères dans le développement de la littérature française. »


Mesdames, Messieurs,


Puisque l’Institut National des Arts et des Lettres, l’Académie Américaine m’ont fait le grand honneur de m’inviter à « lire » devant vous dans cette séance solennelle, mes premières paroles ne peuvent être que l’expression de ma profonde gratitude. Je sais bien que cet honneur va au-delà de ma personne, et que j’en suis redevable surtout à mon pays, à la France, dont la civilisation, la littérature et les arts sont aimés ici d’un amour si fervent. Je le sais ; mais cette certitude, pour un cœur français, ne fait que rendre la dette plus grande, et plus douce à reconnaître.

On remarque dans la vie littéraire de la France depuis des siècles, — et c’est un de ses caractères les plus curieux, — une sorte de rythme, un mouvement de bascule qui fait qu’alternativement nous nous ouvrons, nous nous fermons à l’importation des idées et des formes d’art étrangères. Les périodes d’imitation succèdent aux périodes de création, et de nouveau leur font place, sans que jamais nous demeurions longtemps satisfaits d’être simplement nous.

Nous sommes Italiens, Grecs, Latins, Espagnols, avant d’être nous-mêmes dans nos chefs-d’œuvre classiques. Nous nous jetons ensuite dans l’anglomanie, et nous nous entichons d’une douce, rêveuse et ménagère Allemagne. Enfin,