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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




Comme des signes certains le laissaient prévoir, les divers fronts de combat semblent se ranimer. Le printemps militaire viendra de bonne heure cette année. A peine la colombe déplumée que le Chancelier impérial avait lâchée, avec un fil à la patte et, dans le bec, un rameau empoisonné, est-elle rentrée à son pigeonnier, que fiévreusement on hâte la préparation des futures batailles, sentant bien qu’elles seront terribles, qu’elles seront décisives, et qu’il faut que ce soient les dernières. Depuis quelques semaines, les adversaires, suivant une expression tirée du langage imagé et un peu trivial des lutteurs, « se tâtent, » sur toute la surface du front occidental. Bien que depuis le 1er janvier, il ne s’est guère passé de jour où l’on n’ait signalé, de la mer aux Vosges, ici ou là, des reconnaissances et des canonnades qui n’ont que la valeur d’un avertissement, mais qui sont autant de symptômes. On voit reparaître, l’un après l’autre, les noms accoutumés. La main de l’ennemi se meut rapidement, infatigablement, à la recherche du point faible. Mais nous, non plus, nous ne nous endormons pas ; la garde que montent l’armée britannique et la nôtre est une garde vigilante ; notre calme n’est point inerte, il ne se borne pas à attendre les coups. Il y a sous le ciel gris et lourd quelque chose de solennel, presque de religieux, une sorte d’angoisse sacrée dans laquelle on devine que s’élabore le Destin.

En Roumanie, il était visible, vers le 15 décembre, que la situation avait tendance à se stabiliser. La marche des Austro-Allemands, foudroyante à travers toute la Valachie, et qui n’avait trébuché contre aucune des lignes de défense naturelles, est soudain devenue hésitante; du moins elle s’est ralentie: la prise même de Braïla et de Focsani a marqué une nouvelle halte. Le feu s’est rallumé autour de la boucle dans laquelle le Sereth enferme le village de Fundeni. On dit exactement : « le feu, » car c’est le communiqué officiel russe