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enlever quelques cadavres et à continuer un bout de tranchée. Le lendemain 28 marque une date pour la brigade : le « colonel » Delage, toujours prêt à s’exposer et qui a pour principe de « tout voir par lui-même, » vient surveiller jusqu’en première ligne l’installation d’un téléphone qui doit relier son poste de commandement aux tranchées de la rive droite. Nous n’avions jusque-là, pour communiquer avec cette rive, que des hommes de liaison. Pour la première fois aussi, les fusiliers reçurent des fusées éclairantes et des grenades à main. Tout cela était nouveau pour eux. Et ils n’étaient pas au bout de leurs surprises ! Le même jour ils apprenaient que le groupement Hély d’Oissel était supprimé et que la brigade, qui perdait les deux batteries à cheval de la 7e division de cavalerie, passait sous les ordres du commandant du 20e corps, ainsi que les 87e et 89e divisions territoriales. Ces changemens en annonçaient un autre plus important : le 29, l’amiral recevait avis que la brigade allait être relevée par des unités du 79e d’infanterie et envoyée en réserve dans la zone Linde-Oostvleteren.


VI. — LE MIRACLE DU DRAPEAU

Il était temps. Les bourrasques des journées précédentes, la fange, la fièvre, la dysenterie, les pneumonies, le gel avaient achevé les hommes. Sans doute ce n’était pas encore le repos souhaité : la brigade demeurait en cantonnement d’alerte ; si elle remontait un peu vers le Nord, elle restait toujours à portée de l’ennemi, puisque le 2e régiment devait cantonner à Oostvleteren, le 1er, partie à Linde, partie à Esseldamme. En route nos troupes assistent à un émouvant duel d’aéroplanes entre un Anglais et un Allemand : l’avion anglais pique brusquement, mais finit par regagner nos lignes. Le bataillon Mauros, qui forme l’arrière-garde, a encore deux compagnies en réserve. Il est relevé dans la nuit du 30 au 31 et arrive à son tour au cantonnement, où la brigade s’installe pour remettre en état ses unités.

1er janvier 1915 : la nouvelle année éclôt dans la pluie et le vent. Elle naît comme elle mourra, mais nous ne voulons pas en croire ce maussade augure ; des promesses de victoire claquent dans les plis des drapeaux qu’on a suspendus à la porte de la pauvre église de campagne où l’aumônier Pouchard doit