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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




Dans notre chronique du 1er janvier, la quinzaine se trouvant chargée de deux fêtes chômées coup sur coup, nous avons dû laisser les choses au moment où le Président Wilson venait d’adresser aux belligérans la note par laquelle, sans leur proposer de traiter tout de suite, ni leur offrir sa médiation, il déclarait vouloir pratiquer, en leurs prétentions et leurs intentions, « un sondage, » pour savoir à quelle distance le monde, ballotté depuis trois ans par une tourmente comme il n’en avait jamais vu, pouvait bien être encore du « havre de la paix. » M. Woodrow Wilson ne disait rien de plus, si, vraisemblablement, il en pensait davantage, et c’était peut-être en dire trop ou trop peu. Le premier effet produit fut donc d’étonnement ; on lut la note, on la relut, elle ne parut pas très claire. Ceux qui eurent la bonne fortune d’en connaître le texte même s’accordèrent à vanter les mérites du style: nous qui n’eûmes en mains qu’une traduction imparfaite, nous ne fûmes pas mis en état d’en juger. Il nous fallut chercher, de paragraphe en paragraphe, dans le détour des phrases, le sens, du moins le sens profond, qui s’obstinait à ne pas se découvrir. L’accueil que reçut le document, quel que fût le respect qui s’attache à la dignité et à la personne même de M. Wilson, s’en ressentit d’abord; pour rendre d’un mot l’impression, on ne comprit pas. Chez nous, dans le camp de l’Entente, les esprits enclins au soupçon ne furent pas loin d’y apercevoir comme un obscur dessein de « faire le jeu » des Empires du Centre ; et vainement on leur opposait que la note présidentielle avait, en Allemagne même et dans le même instant, « une mauvaise presse ; » que, là-bas, de nombreux et importans journaux exhalaient un dépit furieux, retournant précisément l’accusation de partialité : « il n’était pas permis d’étaler avec ce sans-gêne la connivence secrète des États-Unis et de l’Angleterre ! » Colère