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déductions insignifiantes consenties aux familles. Puisque l’impôt sur le revenu a un caractère progressif, le revenu à considérer est un revenu individuel : la base de cet impôt devrait être non pas le revenu brut de la famille, mais le quotient de ce revenu par le nombre des personnes qu’il fait vivre. L’objection que plusieurs personnes vivent ensemble à meilleur compte que séparément est sans valeur, car il est juste que les familles nombreuses bénéficient ici d’un léger avantage, faible dédommagement pour la lourdeur des impôts indirects.

D’une manière générale, en matière d’impôts, la législation doit tendre au large dégrèvement des familles de plus de trois enfans à la charge des parens. Ainsi, par exemple, dans l’établissement des rôles relatifs à la contribution mobilière, on devrait déduire non pas une somme uniforme, comme on le fait actuellement, mais une somme proportionnelle au nombre des enfans.

Les lois successorales ont une grande importance dans la question qui nous occupe. Il est incontestable que le partage égal, avec sa rigide uniformité, est contraire à la prospérité générale du pays, et que la pensée du morcellement des biens conduit à la restriction de la natalité. D’ailleurs, le mode de partage actuel, qui satisfait à un instinct irraisonné d’égalité, conduit pratiquement à des inégalités évidentes. On a pu soutenir que, dans une famille nombreuse, le partage égal prescrit par le Code civil constitue un privilège en faveur des cadets. Ainsi deux fils, l’un de quarante ans, l’autre de vingt-quatre ans, sont dans des situations différentes quant à l’aptitude à user de leurs parts successorales ; le second, plus jeune, peut tirer d’une même somme un tout autre parti que le premier.

Vous prenez, dira-t-on, un cas exceptionnel ; les enfans sont le plus souvent très rapprochés. Supposons alors deux fils, l’un de quarante ans, l’autre de quarante et un ans, le premier ayant cinq enfans et le second n’en ayant qu’un. Doivent-ils avoir des parts égales ? On peut penser que non. Il nous paraît légitime de ne pas oublier que, au moment de l’ouverture d’une succession, la famille du défunt ne se compose pas seulement de ses enfans, mais aussi de ceux qui sont sortis d’eux. Un mode de partage, effectué d’après ce point de vue, serait favorable à l’accroissement de la natalité, et corrigerait le plus souvent les privilèges constitués par le Code civil, les descendans au premier degré