Page:Revue des Deux Mondes - 1917 - tome 37.djvu/375

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

temps. Quelques esprits grincheux plaignaient pourtant La Pouplinière de confier son honneur aux mains d’une « princesse de coulisses » et, en hochant la tête, lui prédisaient les pires calamités.

Ces jugemens malveillans restent exceptionnels. La plupart des amis, des commensaux du fermier général approuvent sa détermination. Les félicitations pleuvent de tous les côtés, émanant même parfois des plus hauts personnages. Le prince royal de Prusse, le correspondant de Voltaire, celui qui par la suite s’appellera le Grand Frédéric, adressait à la jeune épouse un compliment rimé et celle-ci répondait de même. Par malheur, ces « versiculets » ne sont pas venus jusqu’à nous. Nous ne les connaissons que par une lettre de Voltaire, lequel s’excuse ainsi de n’avoir pas joint son hommage à ceux des « savans et des princes » empressés à couvrir de fleurs celle qui sera dorénavant Mme de La Pouplinière[1].


Mais quoi, si ma muse échauffée
Eût loué cet objet charmant,
Qui réunit si noblement
Les talens d’Euclide et d’Orphée,
Ce serait un faible ornement
Au piédestal de son trophée.
La louer est un vain emploi,
Elle régnera bien sans moi
Dans ce monde et dans la mémoire ;
Et l’heureux maître de son cœur, »
Celui qui fait seul son bonheur,
Pouvait seul augmenter sa gloire.


SEGUR.

  1. Lettre à Thiériot, du 6 décembre 1737.