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le Tchad, le Bien-Hoa, le Ceylan, la Divona, le Sphinx et enfin la France-IV, somptueux transatlantique, habilement adapté à son nouveau rôle, et qui apporta un supplément de 2 500 lits.

Le médecin-chef du S… m’initie fort aimablement à la vie et à la discipline du navire-hôpital. Il m’en indique le personnel et son rôle, la répartition du service entre les cinq ou six médecins et le pharmacien placé sous ses ordres. Il me montre les installations toutes prêtes pour recevoir les malades dès l’arrivée, couchettes ou cadres, bien disposés contre le roulis, dans des salles vastes et claires où le soleil entre avec l’air salin. Il me fait visiter aussi les salles d’opérations, de pansemens, de radiographie, avec le matériel le plus moderne et le plus complet, tout cet organisme au repos pendant la traversée d’aller, mais qui devra, au retour, recevoir et soulager tant de souffrances ! Car ces bâtimens-hôpitaux ont rendu et rendront encore d’inappréciables services. Lorsque la mission médicale maritime vint à Salonique, après l’évacuation de Gallipoli et de Moudros, les formations sanitaires à peine créées furent aidées puissamment par ces navires qui, depuis, continuent à fonctionner sans relâche. Il y a moins de blessés à transporter, mais il y a beaucoup plus de malades, et le nombre de ceux-ci s’accroîtra, inévitablement, quand arriveront les grosses chaleurs de l’été.

Or, pour les malades surtout, le rapatriement constitue la suprême chance de salut. Les Serbes, rassemblés à Corfou et à Vido, viennent d’en faire l’expérience.

Quand ils atteignirent les côtes de l’Adriatique, après la terrible retraite d’Albanie, la mission militaire française dut leur préparer un asile. Des camps furent créés un peu partout, pour recevoir les troupes encore valides, et l’on installa dans l’ile de grandes tentes remplies de paille, destinées aux malades qui affluaient à chaque arrivée de convoi. Les médecins de la mission, aidés par ceux d’un bataillon de chasseurs alpins, se dévouèrent sans mesurer leurs forces, et il fallut bientôt leur adjoindre tous les médecins de la marine qui n’étaient pas absolument indispensables aux bâtimens de guerre mouillés sur rade. La mortalité cependant prenait des proportions effrayantes, représentant à peu près la moitié du chiffre des entrées. On comptait chaque jour de 100 à 200 décès. En grande hâte, on monta des baraquemens afin