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LE MARQUIS DE VOGÜÉ

Le 12 juin 1902, M. de Heredia, recevant le marquis de Vogué à l’Académie française, résumait ainsi les divers aspects de sa carrière : « Haute, multiple, utile et brillante, votre vie m’apparait comme l’épanouissement de votre race. Je n’en sais pas de mieux remplie. Elle est si pleine qu’elle semble contenir toutes les vies dont elle est la suite… » Aucune définition plus juste. Le grand homme de bien qui s’est éteint, doucement, à la limite de l’existence humaine, entouré de la tendresse des siens, de la vénération de tous, a été un des Français les plus complets de son temps. Gâté par la naissance, la fortune et le talent, archéologue, historien, diplomate, agriculteur, homme politique et homme d’œuvres, appliqué aux tâches les plus variées, dans toutes égal à lui-même, dans toutes « aussi glorieux qu’aimé, » que put-il envier de ce qui vaut ici-bas la peine de vivre ? Qu’eut-il à regretter dans cette longue suite de jours sans trêve consacrés au service des plus nobles causes ? Il étonne, déconcerte d’abord par la richesse de ses dons, et nous ne savons ce qu’il faut admirer le plus de la diversité de son action ou de l’unité supérieure de son œuvre. L’histoire étudiera un jour, dans le détail, tous ses titres à la reconnaissance publique. Nous voudrions simplement, dans l’émotion que nous cause sa mort, rappeler ce qu’il fut : esquisse rapide qui sera comme l’hommage, bien imparfait, d’ailleurs, du souvenir, de nos regrets, de nos respects.


M. de Vogué est né le 18 octobre 1829. On sait que sa famille appartenait au Vivarais. Mêlée, dès le XIe siècle, à son histoire,