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de monde. Les personnes qui, dans d’autres temps, avaient paru m’être très attachées, ne m’ont pas toutes donné des preuves de souvenir. Je leur pardonne de bon cœur. Je ne me rappelle que ceux qui ne m’ont pas oubliée et je ne pense pas aux autres. Je saurai, j’espère, trouver le bonheur autour de moi et dans la tendresse de mes enfans, car je suis sûre que mon cher Eugène m’aimera toujours comme je l’aime. Je n’avais pas dit à M. d’ (Arenberg ? ) ce dont tu me parles dans ta lettre. Il faut qu’il se soit mal expliqué, car je suis bien convaincue que tu ne m’écris rien que d’après ton cœur et ce que tu juges le plus avantageux pour moi. Le général Bertrand m’a dit qu’il devait t’écrire pour te prier d’être parrain de l’enfant dont sa femme vient d’accoucher[1]. Je l’ai assuré que tu lui donnerais avec plaisir cette marque de ton attachement pour lui. Adieu, mon cher fils, j’embrasse Auguste et mes petites-filles et je t’aime tendrement.

« JOSEPHINE. »


Après un séjour de quinze jours à Malmaison (du 1er au 15 novembre), Joséphine est partie pour Navarre où elle restera jusqu’au mois de septembre 1811. C’est là qu’elle apprend la naissance de son petit-fils Auguste-Eugène-Charles-Napoléon, né à Milan le 9 décembre 1810[2]. La nouvelle en a été apportée à l’Empereur par le comte Caprara, grand-écuyer du royaume d’Italie, « l’un des premiers et des plus constans amis que j’ai eus en Italie, » écrivait Napoléon à Eugène le 25 mars 1806. Il était le neveu du cardinal de Milan, et malgré les désordres d’une vie toute livrée au jeu, il resta fort avant dans la faveur de l’Empereur qui le fit grand-croix de la Couronne de fer et sénateur.


Navarre, le 16 décembre (1810).

« Ta lettre du 9, mon cher Eugène, m’est parvenue hier. Tu ne pouvais me donner de nouvelle plus agréable et plus vivement attendue que celle de l’heureuse délivrance d’Auguste. Je sais combien elle désirait un fils. Voilà ses vœux et les nôtres

  1. Hortense-Eugénie, fille de M. le comte Henri-Gatien Bertrand, général de division, aide de camp de Sa Majesté l’Empereur et Roi et de Mme Françoise Elisabeth Dillon. Elle fut baptisée le 24 avril 1811. Elle épousa M. Amédée Thayer et mourut en 1886.
  2. Il épousa par procuration le 1er décembre 1834, en personne, le 26 janvier 1835, Maria II da Gloria, reine de Portugal, et mourut à Lisbonne le 28 mars 1835.