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Balkans: ressusciter la Serbie, et soulager la Roumanie. Qui sait si ce n’est pas en Bulgarie autant et plus qu’en Roumanie même que la Roumanie pourrait être sauvée ? A cet égard, aujourd’hui encore, certains expriment le regret que, devant et voulant tendre une main fraternelle aux Roumains, nous leur ayons tendu la gauche, et non la droite ; c’est-à-dire, sans métaphore, que notre armée de Salonique ait fait son principal effort par son aile gauche, sur la Cerna et dans la région des lacs, non par son aile droite, sur la Strouma; et il va de soi qu’il y en a eu des raisons, dont la première est que les Grecs, en remettant traîtreusement aux Bulgares le fort de Ruppel et les autres ouvrages, nous avaient fermé le passage; mais justement, qu’il y ait eu ces raisons, et que nous n’ayons pu l’empêcher, c’est ce qui demeure regrettable. Cependant, aujourd’hui encore, il n’est pas téméraire de penser que le salut de la Roumanie est en Bulgarie et en Grèce; que, pour aller sûrement le chercher là, il faut pouvoir partir sûrement d’ici. Si on le voit avec certitude, et si on le veut avec énergie, les centaines de milliers d’hommes des armées alliées de Salonique, auxquels se joindrait naturellement tout ce que l’Italie a débarqué et tout ce qu’elle pourrait débarquer, accords faits, à Vallona ou à Santi-Quaranta, apporteront à l’œuvre nécessaire, qui est premièrement, par leur proximité et par les effectifs dont ils disposent, mais qui pourtant ne saurait être uniquement, l’œuvre des Russes, une collaboration des plus utiles. C’est pourquoi nous ne souffrirons pas plus longtemps qu’Athènes soit, dans notre dos, comme une citadelle allemande; et pourquoi nous avons bien fait de reconduire à Cavalla, les ministres, plus extraordinaires encore que ne l’annonçait leur titre, qu’y entretenait la Mitteleuropa; sans compter, maîtres et élèves, ces archéologues à lunettes, chers au bon M. Lambros, qui ne consacraient pas à d’innocentes antiquités toute leur passion et toute leur habitude des fouilles. Si même d’autres mesures deviennent indispensables, n’hésitons pas; ne nous réglons que sur cette maxime, hors de laquelle il n’y a que duperie et dérision : à tout prix, il nous faut avoir derrière nous une Grèce qui nous donne pleine sécurité, loyale ou impuissante, et qui soit notre amie, ou dont nous soyons les maîtres. Politique de guerre, que la guerre commande tant qu’elle dure, et qui cessera avec la guerre; loi martiale, dure loi, mais c’est la guerre.

Sur le front occidental, les événemens sont comme suspendus. Depuis la dernière quinzaine, dans l’intervalle entre le moment où notre chronique est livrée à l’impression et celui où elle est publiée, les troupes britanniques ont remporté, les 13 et 14 novembre, une