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été émis dans le monde, et cela dans une période de difficultés sans précédent. » La Grande-Bretagne sortait de la crise financière la plus grave qu’elle eût connue. Le moratorium accordé aux débiteurs venait seulement de prendre fin, et le Stock Exchange, c’est-à-dire la Bourse, ce mécanisme puissant grâce auquel se plaçaient auparavant les emprunts, était fermé. Mais les grandes banques d’une part, le public de l’autre, ont assuré le succès de l’opération, qui a fourni à l’Echiquier les ressources dont il avait alors besoin.

C’est au mois de juin 1915 que l’Angleterre a émis son second emprunt consolidé. Cette fois, ce n’était plus le taux de 3 1/2 pour 100, mais celui de 4 1/2 qu’elle offrait aux souscripteurs ; mais, d’un autre côté, le prix d’émission était le pair et non plus 95 pour 100. Le montant de l’émission n’était pas limité comme la première fois : les souscripteurs étaient donc certains de recevoir la totalité de ce qu’ils demanderaient. Les titres sont remboursables, au gré du débiteur, à partir de 1925 et au plus tard en 1945.

Les souscriptions à l’emprunt 4 1/2 de 1915 se sont élevées à une somme qui aurait semblé invraisemblable avant que la présente guerre nous eût habitués à des chiffres hors de proportion avec ceux que le monde avait connus jusque-là. 550 000 souscripteurs souscrivirent aux guichets de la Banque d’Angleterre, par l’intermédiaire de laquelle s’émettent tous les emprunts d’Etat et qui en assure le service pour le compte du gouvernement, 570 millions de livres, soit un peu plus de 1 000 livres par tête. 547 000 souscripteurs demandèrent, par l’intermédiaire des bureaux de poste, 15 millions de livres, soit environ 27 livres par tête. Ce dernier groupe est particulièrement remarquable, parce qu’il indique l’entrée en scène d’une catégorie de personnes qui naguère ne connaissaient pas les fonds publics.

La Grande-Bretagne, comme la France, a contracté des emprunts aux Etats-Unis, et elle a conclu avec les porteurs anglais de certaines catégories de titres étrangers des contrats analogues à ceux dont nous avons exposé le mécanisme en France. Elle a, au total, emprunté depuis le début de la guerre, sous des formes multiples, environ 75 milliards de francs.