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200 livrés sterling la moyenne de ceux qui ont été réalisés antérieurement à la guerre. Une pareille taxe était assez facile à établir dans un pays accoutumé à l’impôt sur le revenu. Elle se justifie, selon M. Mackenna, par le caractère même des profits qu’elle frappe, profits extraordinaires recueillis pendant un temps d’épreuves nationales, et dus en grande partie à ce fait dont pâtit la majorité des citoyens, la hausse des prix des denrées. Le ministre estime qu’elle rapportera à l’exercice 1916-17 l’énorme somme de 86 millions sterling (2 150 millions de francs) : quelle autre preuve veut-on de la prospérité économique de l’Angleterre ?

Cette exception faite, le gouvernement britannique s’est conformé aux traditions en demandant à l’impôt indirect une contribution moindre qu’à l’impôt direct. Il est même singulier de voir combien MM. Lloyd George et Mackenna, financiers si audacieux par ailleurs, ont montré de réserve dans leur choix de nouvelles taxes ou surtaxes indirectes. En novembre 1914, M. Lloyd George ne trouve à surimposer que la bière et le thé. En septembre 1915, M. Mackenna, un peu plus inventif, surtaxe encore le thé, puis le sucre, le café et le cacao, le tabac, l’essence, les spécialités médicamenteuses ; il frappe d’un droit ad valorem de 33 pour 100 quelques importations de luxe, autos, films, etc. En avril 1916, il hausse ces mêmes droits intérieurs en y ajoutant un droit sur les eaux minérales et les allumettes et un supplément sur les billets de théâtre et amusemens divers ; il propose, mais sans succès, une surtaxe sur les billets de chemin de fer[1]. Notez le petit nombre des articles imposés, d’où la modicité relative du produit de l’impôt. Nous n’avons pas à prendre parti dans la question des taxes douanières établies pour une année sur certaines denrées de luxe, avec cet objet d’améliorer les changes en restreignant les importations ; elles provoquèrent de vives discussions entre les conservateurs qui auraient voulu les voir développer, et les libre-échangistes qui protestaient contre l’atteinte portée aux principes manchestériens, et, rapprochant avec une exagération

  1. On remarquera l’absence de toute surtaxe sur l’alcool ; elle s’explique par le fait que les droits sur l’alcool avaient été fortement accrus en 1909 et que leur productivité a fléchi. La consommation des spiritueux fait d’ailleurs l’objet de règlemens restrictifs établis par un Board of Control spécialement institué à cet effet.