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articles sur la guerre navale, et notamment dans l’étude qu’il a consacrée récemment au fameux sous-marin commercial Deutschland[1] ; quant à la question de droit international que soulève l’emploi des sous-marins, relativement entre autres à la notion de blocus, M. Bertin l’a traitée naguère avec sa grande autorité dans cette Revue[2].

Aussi n’est-ce ni du point de vue stratégique, ni du point de vue commercial, ni du point de vue juridique que je voudrais à mon tour aborder ici la question du sous-marin, mais plus modestement d’un point de vue technique et scientifique, en montrant par quelques exemples seulement, — car il faudrait des volumes pour épuiser le sujet, — qu’il ne reste point de partie de la physique à laquelle par quelque côté ne touchent ces navires délicats et compliqués, dont les flancs enferment, comme en une synthèse symbolique, presque tout ce que l’homme moderne a su arracher pour la guerre à l’impassibilité tour à tour féconde, ou meurtrière de la science.


Ici comme en tout l’important et le difficile est d’abord de s’entendre sur les mots. Si on entend par sous-marin un vaisseau qui navigue habituellement sous l’eau, il n’y a pas de sous-marin, car la navigation immergée n’est jamais qu’exceptionnelle pour les navires de ce type, et ceci justifie la définition humoristique bien connue dans la marine : « Le sous-marin est un bâtiment qui navigue en surface… » Nous dirons donc : Le sous-marin est un navire capable de naviguer à l’occasion sous l’eau. Mais qu’est-ce alors qu’un submersible ? Les submersibles sont-ils ou non des sous-marins ?

Quelques explications sont ici nécessaires, car on a pris la mauvaise habitude d’englober sous ce dernier vocable des bateaux très différens. Anciennement, on appelait sous-marins des navires capables de plonger à volonté sous l’eau, et qui, même lorsqu’ils naviguaient émergés, ne dépassaient que très peu la surface de l’eau, avaient la plus grande partie de leur volume immergée, en un mot avaient une faible flottabilité, comme on dit dans le patois technique. La flottabilité d’un navire est la fraction de son tonnage dont il émerge quand il flotte. Dans les premiers sous-marins et dans tous ceux qu’on construisit jusqu’à ces deux dernières décades, cette fraction était petite. Sur les sous-marins du début la flottabilité n’était que d’environ 5 pour 100,

  1. Voyez la Revue du 15 août 1916, p. 888.
  2. Voyez la Revue du 15 août 1915, p. 758.