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comme on le sait, d’un accord secret entre les quatre Puissances alliées ; c’est le fameux traité de Chaumont, « le grand traité d’alliance, » dit Munster, « le plus étendu peut-être qui ait été conclu, » écrit Metternich à Merveldt. « Il gouverna l’Europe jusqu’en 1848 et fonda cette coalition des quatre qui, tant de fois disloquée, se reconstitua chaque fois que la France montra quelque velléité de sortir des limites que les alliés prétendaient lui imposer. Il constitua, en quelque sorte, le pouvoir exécutif de l’Europe dont les traités de Paris du 30 mai 1814 et de Vienne du 9 juin 1815 formèrent la Charte[1]. » On sait aussi que l’effort de Talleyrand, au Congrès de Vienne, consista surtout à dissocier, dans la mesure du possible, les quatre Puissances et à créer une entente particulière où la France de Louis XVIII aurait sa place.

Dans la guerre actuelle, les Puissances alliées ont pris l’engagement réciproque de ne pas mettre bas les armes séparément. Il est probable que des accords d’une nature plus précise et plus complète sont étudiés entre elles. Sans essayer de percer le secret de la diplomatie, il suffit de rappeler, devant l’opinion, que ces accords préalables, mûrement étudiés et établis d’avance, sont les conditions nécessaires d’une bonne et prompte négociation.

En somme, comme le simple bon sens l’indique, les clauses de l’armistice sont fonction d’un bon idéal de la guerre et d’une sage conception de la paix.


III. — QUELS SERONT LES PARTICIPANS A LA PAIX ?

Puisque la guerre a pour objet de créer de nouveaux rapports entre les Puissances qui y sont engagées et que la paix a pour objet de dégager et de préciser ces rapports pour en faire des droits, il y aura lieu d’établir d’abord, avec une grande rigueur, la liste des personnes internationales ou États qui prendront part soit à la conclusion de l’armistice, soit aux délibérations de la paix.

Cette question des participans à la paix est d’une importance extrême : par la seule prévision qu’elle interviendrait, certaines Puissances ont déjà pris rang parmi les belligérans ;

  1. Albert Sorel, L’Europe et la Révolution française, t. VIII, p. 290.