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droits, car, ainsi qu’il le prouva depuis, à travers les tragiques aventures de sa vie politique, c’était un esprit judicieux et prévoyant et un ardent patriote. Cette autorité, il l’emploiera d’abord à écraser la révolte.

En arrivant à Sofia, les révolutionnaires s’étaient empressés de former un gouvernement provisoire ; ils se flattaient d’être approuvés et soutenus par la population et par l’armée. Mais lorsqu’ils tentèrent de s’imposer, l’indignation éclata de toutes parts ; le peuple refusa de reconnaître ces usurpateurs de l’autorité légitime. En quelques heures, avec le concours de diverses garnisons de province appelées dans la capitale, la contre-révolution s’organisait. Stamboulof comprend alors que, si elle n’est pas maîtrisée, elle continuera l’anarchie. D’une main ferme, il en prend la direction. Il fait arrêter les émeutiers et les membres du gouvernement provisoire, auquel il en substitue un autre de sa composition. Le 25 août, les Bulgares peuvent lire sur les murs de leur capitale une affiche ainsi conçue :

« Au nom du prince Alexandre et de l’Assemblée populaire, je déclare que je prends la présidence du gouvernement provisoire à Sofia et que quiconque refusera d’obéir sera traité en rebelle. Je nomme aux fonctions de général commandant Moutkourof, — son beau-frère, — et je le charge de tous les pouvoirs civils et militaires. En conséquence, chacun est tenu de lui obéir.

« Je supplie le peuple bulgare de défendre la couronne et la patrie contre les traîtres qui voudraient renverser du trône notre bien-aimé prince. Avec le puissant concours du peuple et de l’armée, nous saurons défendre le prince, l’élu de la nation.

« Vive le prince Alexandre de Bulgarie ! »

Entre temps, il a écrit au prince pour l’inviter à revenir. Grâce à ces mesures, la principauté est en voie de pacification, lorsque, le 3 septembre, le jeune souverain rentre à Sofia, entouré d’une brillante escorte et salué par les acclamations d’une foule enthousiaste qui semble vouloir le venger. On doit le croire alors plus puissant que jamais, mais il doute de sa puissance. Il fait savoir à l’empereur de Russie qu’il sera heureux de lui donner la preuve définitive de son dévouement. « Le principe monarchique m’a forcé de rétablir la légalité en Bulgarie et en Roumélie. La Russie m’ayant donné la couronne, c’est entre les mains de son souverain que je suis prêt à