aux confidences, et Kroner, en vraie « fleur du Wurtemberg, » n’y manqua pas.
— J’aime ces deux vieux Schmoler, surtout Mme Jacobine, avec son bonnet si bien attaché, avec ses joues si bien lavées, avec ses bons yeux de grand’mère. Elle me rappelle tellement ma maman, si simple aussi, si propre de conscience… Mon père est postillon. Il sonne du cor dans les forêts du Wurtemberg. Je suis vraiment son fils… Ah ! si vous pouviez voir notre maison, au coin de la forêt, près de la rivière (et c’est pourquoi j’aime beaucoup cet endroit où nous sommes). Quelque chose est posé sur mon toit, quelque chose de mieux encore qu’une cigogne : c’est la paix, c’est la bonté, c’est le désir d’accomplir la volonté divine. Et ma mère est assise devant la porte, qui raccommode, qui épluche les légumes, qui dit bonjour aux passans… Tout à coup, le cor sonne, et c’est le père, là-haut, sur le siège de la voiture. Il s’arrête un instant. Il dit : « Bonjour, Mutter… » Elle répond : « Bonjour, Vater… » Ils se regardent. Le fouet claque et les grelots sonnent à nouveau dans le bois… J’aime mon Wurtemberg… Et j’aime aussi l’Alsace, sa franchise, sa fierté. Pauvre Alsace, comme nous la menons dur !… Pauvre Alsace !… Je suis bon patriote, monsieur Reymond, vous pouvez en être sur. Et c’est pourquoi je dis aussi : Pauvre Allemagne !
— Et pourquoi donc ?
Kroner ne répondit rien.
Et le père Schmoler disait souvent :
— M. Kroner ?… C’est un Allemand comme on en fabriquait au temps de mon père.
- (La troisième partie au prochain numéro.)