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pourvus de tous les perfectionnemens modernes, tourelles comprises. Par conséquent, point autre chose, comme opération tactique spéciale, que des dragages minutieux. Et l’on y est, en ce moment, beaucoup plus entendu qu’en février et mars 1915.

Il faut tout dire, cependant. Ce détroit ne débouche pas directement dans la mer qu’il nous importe d’occuper. Pour accéder à celle-ci, il faut, après avoir traversé une sorte de bassin au fond duquel se cache le port de guerre principal de l’ennemi, franchir un second passage dont la rive méridionale est allemande. On peut donc compter de ce côté-là sur une accumulation de moyens défensifs dont la valeur s’augmente du fait que la flotte assaillante devra, tout en détruisant ces organisations, « masquer » l’entrée du fjord auquel je viens de faire allusion et s’opposer à l’irruption de ce qui pourra rester de la flotte allemande, puisque aussi bien, c’est dans ce fjord que débouche le canal maritime. Mais n’oublions pas qu’à côté des dragueurs, nos flottes ont des mouilleurs de mines. Il est même assez curieux du constater que la torpille fixe automatique fut tout d’abord destinée à fermer les ports d’où pouvait sortir une force navale gênante, si bien qu’on les appelait « torpilles de blocus. » Ce serait tout à fait le cas de faire appel à ces engins.

D’autre part, s’il s’agit de lutter contre les batteries à terre disposées sur la rive Sud du deuxième détroit [1], batteries tout au ras de l’eau et que rien ne dissimule, nous avons aujourd’hui des monitors fortement armés et fortement défendus qui n’existaient pas lors du combat du 18 mars 1915. Ces bâtimens constituent-ils un bon parc de siège, un parc de siège complet, comprenant des mortiers ou obusiers courts ? J’espère que oui. S’il en est autrement, il faut se hâter de combler cette lacune. L’attaque méthodique des ouvrages de côte exige l’emploi des feux courbes, ainsi que la mise en jeu de projectiles à parois minces, fortement chargés en explosifs. Depuis vingt-six mois que les vaisseaux tirent, ici ou là, sur les batteries, ces vérités ont dû être reconnues et les mesures nécessaires ont dû être prises.

En résumé, il n’est que de vouloir pour arriver en temps utile à cette balance des moyens d’action de la défense et de

  1. Ce détroit a 18 kilomètres de large et les unités de combat à grand tirant d’eau peuvent longer d’assez près la rive Nord.