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prisonniers civils des camps de concentration, sur les prisonniers militaires internés dans les quatre cents camps d’Allemagne et d’Autriche.

Par les récits des soldats évadés, des grands blessés rapatriés, nous connaissons aujourd’hui, dans tous leurs détails, l’organisation des forteresses, casernes, baraquemens, où sont enfermés nos captifs. Nous savons que le régime varie d’un camp à l’autre, suivant l’humeur et l’éducation du chef qui en a le commandement. Nous savons aussi quelle vie effroyable fut celle des prisonniers, envoyés dans le camp de représailles de Ohrdruff, supprimé heureusement. Mais ce que nous ignorons trop, c’est que les mesures inspirées par un sentiment d’humanité envers le courage malheureux, c’est que l’adoucissement aux rigueurs de la captivité à Holmunden, à Dusseldorff, Altengraben, Daberitz, Munster, Quedlimburg, Heidelberg, etc. sont dus en grande partie à l’intervention énergique et constante de la Commission espagnole.

Cette Commission a son siège à Berlin ; elle a pour président le comte del Cadagua, ministre plénipotentiaire, et se compose de dix membres, choisis parmi des attachés d’ambassade, des officiers et des médecins. Les travaux sont dirigés par S. E. M. Polo de Bernabe, ambassadeur d’Espagne à Berlin. Son rôle est de visiter et surveiller les camps de prisonniers français, s’assurer que l’alimentation est suffisante, l’hygiène observée, les précautions prises contre les épidémies ; que les secours envoyés de France, les provisions, l’argent, sont bien remis aux destinataires. Y a-t-il des plaintes et des réclamations à recevoir, le délégué de la Commission espagnole est là ; il entend sans témoin, — c’est son droit, — le prisonnier qui lui parle :

— Nous sommes mal nourris, dit celui-ci ; nous n’aimons pas la saucisse qu’on nous donne ; les morceaux de viande sont trop petits et rares ; nous voudrions faire notre popote et vivre sur les paquets qu’on envoie de « chez nous. »

— Nous sommes mal couchés, dit un autre. Voyez cette paillasse, elle n’a pas été renouvelée depuis six mois ; la paille n’est que poussière. Nous couchons directement sur le sol, ne pourrions-nous obtenir que la paillasse reposât sur un cadre ?

— Nos couvertures sont insuffisantes. En hiver, on gèle, en été l’air est irrespirable ; ne pourrait-on ventiler ? Les mauvaises