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mettant à une rude épreuve le courage des blessés et la patience des chirurgiens, et qui nous permettent aujourd’hui de comprendre l’histoire de ces vieux soldats des guerres du premier Empire, que nous connaissions dans notre enfance — et qui, depuis soixante ans, voyaient de temps en temps se « rouvrir leur blessure. »

Beaucoup de ces hôpitaux de l’arrière sont d’une grande activité. Sans doute, ils ne connaissent pas les momens de travail intensif et épuisant des ambulances du front. Mais l’activité y est plus suivie, plus soutenue, plus régulière, et, depuis deux ans qu’il dure, le travail des chirurgiens de l’arrière, bien que se faisant loin du canon, donne à ceux qui l’ont accompli, — et dont beaucoup touchent à l’âge où l’on aspire au repos, — le sentiment d’avoir sauvé la vie à bien des blessés, d’avoir rendu à l’armée beaucoup des combattans dont elle a besoin, et d’avoir enfin, au cours du drame immense au milieu duquel nous vivons, rempli leur devoir jusqu’au bout.

Mais nous n’avons pas été seuls, et dans le pays entier nous avons trouvé une aide admirable dans toutes les femmes de France qui ont été s’asseoir au chevet des blessés, et qui, malgré la fatigue, malgré la lassitude qu’apporte fatalement la longue durée de la guerre, sont toujours là, le jour et la nuit, les unes accomplissant mille besognes obscures, les autres exécutant chaque jour pendant des heures les pansemens les plus pénibles, aidant aux opérations, passant leurs nuits auprès des opérés, veillant les mourans et ensevelissant les morts !

Que ferions nous sans ces milliers et ces milliers de femmes de bonne volonté, souvent très instruites et connaissant merveilleusement ce qu’elles ont à faire, toujours compatissantes et toujours dévouées, religieuses ou laïques, travaillant pour l’amour du Christ ou la simple satisfaction du devoir accompli ! Que ferions-nous sans elles, et si nous n’avions, pour nous aider dans l’immense travail que représentent les soins de centaines de milliers de blessés et de malades toujours renouvelés, que les infirmiers militaires, dont beaucoup certes sont courageux, dévoués et compétens, mais dont l’ensemble se ressent de l’incohérence qui a présidé à leur recrutement ! On ne dira jamais assez, ni assez haut, ce que nous devons aux infirmières volontaires qui ont accompli une œuvre immense et qui auraient fait plus encore si les autorités militaires le leur avaient permis.